24 décembre 2019 - Messe de la Nuit de Noêl — Diocèse de Tulle

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24 décembre 2019 - Messe de la Nuit de Noêl

Cathédrale Notre-Dame de Tulle

Frères et sœurs,

 

La fête de Noël est la fête de la révélation de Dieu devenu homme en son Fils. Et, à cause de cela, elle est aussi la fête qui révèle l’humanité à elle-même. Connaître le Christ de la crèche nous conduit à nous regarder d’une façon nouvelle.

Jésus, le bébé de la crèche, en nous faisant accéder à l’infinie nouveauté de l’Absolu de Dieu, nous fait aussi entrer dans une vision nouvelle de l’homme et de l’humanité. « Voici l’Homme » s’est crié Pilate en montrant à la foule Jésus défiguré par les tortures (Jn 19, 5). Nous pouvons dire ces mêmes mots en contemplant Jésus, le nouveau-né de la crèche. Jésus est vraiment l’Homme nouveau, l’origine d’une humanité nouvelle, l’Homme véritable nous appelant à l’accueillir pour que nous puissions devenir des hommes et des femmes véritables. Dès lors, toute personne humaine est, en un sens, absolue. Il y a en elle quelque chose sur quoi nous n’avons aucune prise, nous ne devons avoir aucune prise, qui nous dépasse, qui touche au Mystère de Dieu. C’est ce que le langage chrétien appelle l’image de Dieu, la ressemblance du Christ, les traces de l’Esprit.

Le Mystère de Noël nous oblige à nous regarder nous-mêmes et tous nos frères et sœurs avec un regard autre. Parce que le Verbe de Dieu éternel, créateur, source de vie, de lumière et de vérité, est devenu chair, s’est fait chair, c’est-à-dire homme, dans sa fragilité, sa précarité, sa mortalité, alors, l’homme, tout homme, est habité d’une grandeur indicible. Oui, Noël nous révèle à nous-mêmes et révèle tout être humain à lui-même. En contemplant Jésus dans la crèche, chaque homme, chaque femme est appelé à reconnaître sa propre dignité et celle des autres hommes et femmes de notre monde. Nous devons vraiment y penser devant les personnes malades, handicapées, les torturés, les victimes de la faim, de la persécution, de la drogue, de la guerre, devant ceux et celles qui sont méprisés et humiliés, devant quiconque, fût-il un criminel. Nous devons y penser devant toute personne rencontrée.

Il faudrait aussi y penser dans les discussions de société autour de l’embryon, des recherches sur l’embryon, du clonage, de l’euthanasie, du mal fait aux enfants, de la guerre, de la torture, de l’esclavage toujours actuel dans certains pays, de la misère, etc. Le Mystère de Noël nous révèle que l’homme n’est plus seul à être homme. Dieu, en Jésus, est homme pour toujours. Il est devenu le prochain de tout homme. Toute vie humaine, si petite, si insignifiante, si pauvre soit-elle, a un lien avec celle de Jésus, le Verbe de Dieu fait chair. Rien ne peut plus être fait à un homme, à une femme, sans que le Christ, et donc Dieu, soient mis en cause. Frères et sœurs, réalisons-nous assez la révolution qu’a opérée, de ce point de vue, l’événement passé inaperçu de l’Incarnation du Verbe de Dieu dans le sein de la vierge Marie ?

A l’arrière-plan de la pensée de l’Eglise sur l’homme et la société, il y a cette foi inébranlable au Christ, Verbe de Dieu, devenu chair. C’est pourquoi l’Eglise parle avec autant de fermeté de Dieu et de l’homme, des droits de Dieu et des droits de l’homme. Pour elle, Dieu et l’homme ne peuvent plus être séparés. Si bien qu’après la mort de Dieu criée haut et fort par les athées, on peut craindre que viendra aussi la mort de l’homme, car si Dieu n’existe plus, l’homme non plus n’existera plus ! L’Eglise ne peut pas, ne doit pas se désintéresser des différents domaines de la vie humaine, comme le sont la vie politique, économique, sociale, culturelle, familiale, sexuelle. Quand elle parle de tous ces domaines, elle ne sort pas, n’en déplaise à certains, de son devoir de parler de Dieu, du Christ, de la vie éternelle, des sacrements, de la prière. Lorsqu’elle parle de l’homme, dans toutes ses dimensions, c’est encore et toujours de Dieu devenu homme en son Verbe fait chair qu’elle parle.

Devant la crèche de Noël, nous ne pouvons que dénoncer tous les absolutismes qui atteignent les personnes humaines dans leur corps, leur esprit et leur âme. Nous devons protester contre tous les pouvoirs et les conditions de vie qui déshumanisent. Jamais, nous ne dirons assez l’offense qui est faite à l’Absolu de Dieu quand l’absolu de l’homme est bafoué. Le saint Pape Paul VI avait dit un jour une parole qui lui a été souvent reprochée : « Nous aussi nous avons le culte de l’homme ». Eh bien, il avait raison contre tous ses accusateurs qui prétendaient grandir Dieu en rabaissant l’homme. Si nous avons le culte de l’homme, c’est justement parce que mettons au-dessus de tout l’absolu de Dieu qui a fait l’homme à son image, parce que nous adorons avec un infini respect l’absolu de Dieu devenu mortel, pour que, par cette fragilité et cette mort, l’homme devienne participant de l’absolu de Dieu, de sa divinité.

Aujourd’hui, comme chaque jour, le bébé de la crèche nous dit, sans parole : ne portez pas atteinte à l’enfant dans le sein de sa mère, ayez un immense respect pour les personnes handicapées, n’acceptez pas que les enfants soient salis par la société, que les adultes les sacrifient à leur propre bonheur et à leur propre plaisir ; montrez aux enfants et aux jeunes que leur vie a un sens ; refusez ce qui dégrade les hommes et les femmes dans leur corps, leur esprit et leur âme ; accompagnez jusqu’au bout les personnes âgées et les mourants ; développez la solidarité avec les personnes et les peuples pauvres ; traitez les étrangers avec respect et dignité, retrouvez le sens évangélique de la charité, qui va de l’attention aux personnes qui nous entourent jusqu’à l’action pour et avec les peuples pauvres de la terre.

Jamais, frères et sœurs, nous n’aurons fini de contempler le Mystère de Noël dans la réflexion, la prière, la liturgie, la rencontre des autres. En regardant les merveilleuses crèches de nos maisons et de nos églises, c’est ce mystère de Noël qu’il nous est donné de contempler. Car, au centre de nos crèches, il y a un petit être humain. Ce petit être humain, vers lequel sont tendus tous les regards et qui attire tous les personnages, c’est le Verbe de Dieu, le Fils éternel de Dieu devenu chair pour que nous découvrions en lui ce qu’il nous appelle à être : des fils et des filles de Dieu sauvés et divinisés par la bonté, la tendresse et la grâce de Dieu qui rayonnent de lui. Amen.

 

 

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