12 mai 2019 - 4ème dimanche de Pâques – Année C — Diocèse de Tulle

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12 mai 2019 - 4ème dimanche de Pâques – Année C

Pèlerinage de Saint Sagittaire à Saint-Settiers - Visite pastorale

 

         Frères et sœurs, lorsqu'on parle de la vie chrétienne, on pense spontanément à la foi, et c'est bien normal car pour être chrétien il faut croire en Dieu, Père, Fils et Saint Esprit. Lorsqu'on parle de la vie chrétienne, on pense aussi à la charité, puisque les deux grands commandements de la Bible concernent l'amour de Dieu et de nos frères : "tu aimeras le Seigneur ton Dieu de tout ton cœur, de toute ton âme, de toutes tes forces et tu aimeras ton prochain comme toi-même". Jésus, la veille de sa mort, a précisé pour ses disciples comment ils doivent aimer : "aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés".

         Mais, il y a une troisième vertu théologale dont on parle moins : il s'agit de l'espérance. En quoi consiste-t-elle ? Elle indique le but de la vie chrétienne, c'est-à-dire la vie éternelle. Un philosophe contemporain a écrit que dans nos sociétés modernes les hommes sont tristes parce qu'ils sont plus intéressés par les moyens de vivre que par le but de la vie.

         Quand nous lisons la Bible, nous remarquons que presqu'à chaque page, il est question du salut et de la vie éternelle. De quoi parle la Bible ? Elle ne parle pas d'abord de ce que nous devons faire ; elle parle de Dieu et de ce que Dieu fait pour nous. Elle n'est pas d'abord un livre de morale, mais un livre de théologie. Elle parle de Dieu et des œuvres de Dieu en faveur des hommes. Ainsi, au livre de la Genèse, la Bible commence dans un jardin, pour dire que Dieu est créateur et qu'il a fait le monde et ses merveilles, avec au sommet l'homme et la femme, qui sont à son image ; et au livre de l'Apocalypse, le dernier, la Bible se termine dans une ville, la Jérusalem céleste, pour indiquer le but de l'œuvre divine : la vie éternelle. La Bible nous enseigne d'où nous venons et où nous allons. Tout vient de Dieu et tout retourne à Dieu. Il y a l'origine du monde et de l'homme et il y a la fin, le but : vivre éternellement en Dieu.

         Les lectures que nous avons écoutées aujourd'hui sont toutes tirées du Nouveau Testament, parce que nous sommes dans le temps pascal. Et vous avez peut-être remarqué que dans ces trois lectures, il est précisément question de l'Espérance en la vie éternelle. Dans le livre des Actes des Apôtres, nous voyons Paul et Barnabé prêcher la Bonne Nouvelle du Salut aux juifs et aux païens d'Antioche de Pisidie. L'auteur du livre – saint Luc – donne le résultat de cette prédication : "les païens étaient dans la joie et rendaient gloire à la parole du Seigneur ; tous ceux qui étaient destinés à la vie éternelle devinrent croyants". On croit pour avoir la vie éternelle et cela procure la joie. Dans le livre de l'Apocalypse, le voyant, Jean, décrit l'objet de sa vision : la foule innombrable de ceux qui ont lavé leur robe dans le sang de l'Agneau, c'est-à-dire des martyrs de tous les temps qui ont traversé la grande épreuve de la persécution et en sont sortis vainqueurs, grâce au Christ Pasteur qui les a conduits aux sources des eaux vives, c'est-à-dire à la vie éternelle. Saint Sagittaire fait partie de cette foule immense de témoins qui ont versé leur sang ne témoins du Christ. Enfin, dans l'Evangile, Jésus lui-même parle de ceux qui le suivent et du but de leur pèlerinage : "Mes brebis écoutent ma voix ; moi, je les connais, et elles me suivent. Je leur donne la vie éternelle : jamais elle ne périront, et personne ne les arrachera de ma main".

         Ainsi, frères et sœurs, nous comprenons que l'objet de la prédication – prédication du Christ, prédication de Paul, prédication du visionnaire Jean – c'est le salut, c'est la vie éternelle. On peut résumer ainsi le message : Dieu a tellement aimé le monde qu'il a envoyé son Fils unique ; lequel a donné sa vie pour racheter la multitude, pour sauver l'humanité, pour nous obtenir la vie éternelle.

         Il y a cependant quelque autre chose de commun à ces trois lectures. C'est la résistance du monde au salut. Paul et Barnabé se heurtent à l'opposition des notables juifs qui sont jaloux de leur succès. On les chasse de la ville. Et quand on lit le livre des Actes des Apôtres, on constate cette opposition, cette persécution des messagers de la Bonne Nouvelle. Et pourtant, rien n'arrête la course de l'Evangile. Dans le livre de l'Apocalypse, il est question de ceux qui ont traversé la grande épreuve : les martyrs. Dans l'Evangile Jésus se présente comme le pasteur des brebis qui veille pour qu'aucune ne soit arrachée de sa main et de la main du Père. C'est dire qu'il y a une menace certaine. Il y a quelques années, dans une homélie, à Sainte Marthe, le pape François avait évoqué, avec des paroles très fortes, cette résistance du monde au message du salut et la persécution qui en découle pour les disciples du Christ, tout au long des siècles. "La persécution est le pain quotidien de l'Eglise" a dit le Pape. Elle existe sous deux formes : une forme sanglante et une forme idéologique. Il existe des "persécutions sanglantes – être jeté aux fauves ou être victime d'une bombe dans une Eglise (comme il y a peu, au Sri Lanka) – et des persécutions en gants blancs, des persécutions travesties de culture, de modernité, de progrès, celles qui te confinent dans un recoin de la société, qui en viennent à te faire perdre ton travail si tu n'adhères pas aux lois qui vont contre Dieu créateur". De tout cela, Jésus nous a averti, nous a prévenu. Et nous ne devons pas en être effrayés, parce que nous savons que le Christ a vaincu le prince de ce monde.

         Dans de nombreuses lettres que je reçois des confirmands du diocèse, les jeunes me parlent des difficultés qu'ils rencontrent pour vivre leur foi. Certaines viennent de leur propre manque de motivation, mais d'autres viennent de cette persécution que le pape qualifie d'idéologique, de culturelle. Quand on est jeune, on a du mal à affronter les moqueries des camarades ; et on souffre parfois du peu de soutien de la famille et des autres chrétiens. Je leur dis que je comprends tout cela. Mais je leur dis aussi que la condition de chrétien, la condition de disciple de Jésus ne consiste pas à être préservé des épreuves qui sont le lot de toute existence humaine ni des épreuves que nous causent nos persécuteurs. Jésus ne nous a pas dit : "viens derrière moi et tu seras tranquille" ; il nous a dit : "celui qui veut marcher à ma suite, qu'il prenne sa croix et qu'il me suive". Il ne s'agit pas de jouer à la victime – chose si courante à l'heure actuelle dans nos sociétés – mais d'affronter les épreuves avec la force que nous procure la foi et l'espérance en la vie éternelle.

         Est-ce possible ? Oui, puisque Jésus nous a promis d'être avec nous. Il a promis à ses disciples qu'il leur enverrait l'Esprit-Saint. Et il le nomme le Paraclet, c'est-à-dire à la fois l'Avocat et le Défenseur. On ne peut pas prétendre se dire chrétien et ne pas témoigner du Christ qui est notre vie, notre Sauveur. Et, en même temps, sans l'Esprit-Saint, nous serions comme des soldats sans armes ni cuirasse. Le don de l'Esprit Saint, c'est l'équipement du chrétien pour la mission. Et la mission, c'est la raison d'être de l'Eglise. Que dit Jésus aux Apôtres avant de monter au Ciel : "Allez dans le monde entier, de toutes les nations faites des disciples ; baptisez-les au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit". Voilà ce qui a animé la vie de saint Sagittaire. Nous ne savons presque rien de lui, si ce n’est qu’il est mort martyr de la foi. Il est, dans les premiers siècles de la foi, ici sur ce haut plateau, un vrai disciple-missionnaire, qui a pris l’Evangile au sérieux et qui, à l’exemple de son Maître et Seigneur Jésus-Christ, a donné sa vie.

         Aujourd'hui, c'est le dimanche des vocations, c'est-à-dire la journée mondiale de prière pour les vocations. Nous prions le Maître de la Moisson pour qu'il envoie des ouvriers à sa moisson et pour que ceux qu'il appelle aient le courage de répondre à l'appel. Dieu appelle toujours, mais, aujourd'hui, dans nos sociétés matérialistes, peu de jeunes répondent à son appel pour devenir prêtres, diacres ou consacrés. La première mission des ministres ordonnés, c'est avant tout d'annoncer l'Evangile en vue du salut, en vue de la vie éternelle. En premier lieu, c'est la mission des évêques, mais les évêques ne peuvent l'accomplir que s'ils ont des collaborateurs, les prêtres et les diacres. La grande épreuve de notre Eglise de France, et plus encore celle de l'Eglise en Corrèze, c'est que nos communautés chrétiennes ne donnent plus les prêtres dont l'Eglise a besoin pour sa mission. Cela doit nous interroger. Non pas pour nous morfondre ou nous culpabiliser, mais pour nous inciter à un sursaut d'engagement, de vie de foi, d'espérance et de charité. Que l'Esprit de Pentecôte souffle sur nous et nous conduise au large, qu'il secoue nos torpeurs et nos doutes, qu'il donne aux jeunes le courage, la force et la générosité pour prendre leur place dans la barque de l'Eglise, pour être témoins du Ressuscité. C’est ce que nous demandons par l’intercession de celui que nous fêtons en ce jour, saint Sagittaire. Amen.

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