6 juillet 2019 - Messe d’action de grâce — Diocèse de Tulle

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6 juillet 2019 - Messe d’action de grâce

Départ de M. François DAVID - Bossuet

 

         Chers amis, en cette occasion très particulière, l’homélie aussi prend des accents un peu inhabituels. Non pas qu’elle veuille se transformer en panégyrique de celui qui est à l’honneur aujourd’hui, mais parce qu’à travers la personne de François David et les fonctions importantes qu’il a exercées, ici, à Brive, et plus largement dans l’Enseignement catholique diocésain, interdiocésain, régional et même national, à travers son action, son engagement, son dévouement, ses compétences, l’occasion nous est offerte de prendre de la hauteur, si je puis dire, et de regarder avec fierté et avec une vraie joie le fait d’appartenir à cette famille qu’est l’Enseignement catholique dans un diocèse, et même plus largement dans notre pays et dans l’Eglise universelle. Occasion aussi de porter nos regards vers le passé proche et le passé plus  lointain, afin de rendre grâce pour l’oeuvre récente accomplie par vous, François, et avec vous, mais aussi pour l’oeuvre séculaire, ici et dans notre pays, accomplie par les Ecoles catholiques, pionnières – n’ayons pas peur de le dire – en matière d’instruction et d’éducation de la jeunesse, bien avant que l’Etat ne développe ce qu’on appelle maintenant « l’Education nationale ». Occasion encore de porter nos regards vers le futur, vers l’avenir, avec la volonté que cette oeuvre d’éducation – la plus noble sans doute des oeuvres humaines – puisse se poursuivre, quels que soient les conjonctures, les aléas, les vents favorables ou contraires, avec lesquels nous devrons écrire de nouvelles pages du grand livre de l’Education catholique, ici en Corrèze et dans notre pays.

         Permettez-moi de rappeler un souvenir. Lorsque j’ai appris que j’étais nommé évêque de Tulle – c’était en novembre 2013 – j’ai cherché bien vite à me renseigner sur le diocèse de Tulle, que je ne connaissais pas. Et j’ai eu l’idée d’aller regarder dans les archives de la chaîne KTO, dans l’émission « La vie des diocèses ». Et j’y ai trouvé deux interviews de Mgr Charrier. Dans l’une d’elles, cher François, vous étiez vous-même interviewé sur l’Enseignement catholique. C’est là que j’ai fait votre connaissance, si je puis dire, avant même de vous rencontrer in situ. Et je me souviens très bien de vos propos. Vous expliquiez en quoi l’Enseignement catholique était précisément « catholique ». Essentiellement de deux manières, intrinsèquement liées entre elles. D’abord parce que nos écoles sont ouvertes à tous et que ce « tous » exprime la catholicité de l’Eglise, sa dimension d’universalité ; et cela se comprend, puisque l’Evangile du salut n’est pas réservé à quelques privilégiés mais est destiné à tous les hommes. En conséquence, il est bien normal aussi que l’Ecole catholique veuille mettre ses compétences en matière d’enseignement et d’éducation au service de tous les jeunes, sans distinction de milieu social, de capacités intellectuelles et même de religion. La deuxième manière d’être catholiques pour nos écoles, disiez-vous, c’est qu’elles soient réellement « catholiques », c’est-à-dire qu’elles honorent leur « caractère propre » (selon la fameuse expression consacrée), leur spécificité de participer à la mission de l’Eglise, en vivant de la foi, de l’Evangile, en n’ayant pas peur de l’annoncer et d’en témoigner. Bref, que nos écoles soient de réelles communautés d’Eglise, au sein des Communautés paroissiales et de l’Eglise diocésaine.

         Ces propos que vous teniez, François, dans l’émission de KTO, rejoignaient ceux de Mgr Jean-Louis Bruguès, alors qu’il était Secrétaire du Dicastère romain de l’Education catholique, dans un interview qu’il avait accordée, me semble-t-il, au Journal La Croix. Ouverture, universalité, catholicité et, en même temps, inséparablement, identité catholique, c’est-à-dire volonté de transmettre la foi, d’annoncer l’Evangile, d’être communauté d’Eglise.

         Ce que vous disiez au sujet de la nature de nos Ecoles catholiques, vous l’avez mis en oeuvre pendant les nombreuses années où vous avez exercez la belle mais difficile fonction de Directeur, ou du moins – je suis modeste pour vous – vous avez essayé de le faire ; car vous savez comme moi que c’est un défi, en même temps qu’un objectif restant toujours, pour une part, inachevé, tout comme l’est la mission d’éduquer la jeunesse. J’ai été témoin de tout cela, lors de ma visite pastorale en 2016, où j’ai passé plusieurs jours dans les trois sites d’Edmond Michelet, et plus, particulièrement ici, à Bossuet, où je suis resté un peu plus longtemps, puisqu’il y a à la fois, le primaire, le collège et le lycée. Et aussi, à bien d’autres occasions, j’ai pu constater cette ouverture de l’Etablissement à tous et – vous pouvez en être fier – à des jeunes en difficulté (pour toutes sortes de motifs), dont vous vouliez la réussite scolaire et humaine, et pour lesquels vous cherchiez les moyens concrets d’un accompagnement particulier. Vous n’avez pas cherché à « écrémer », comme on dit, en vue d’obtenir du 100 pour cent de réussite aux examens. Vous avez recherché le bien des élèves, avant les classements aux palmarès académiques ! Mais, j’ajoute, pour ne pas faillir à la vérité, que vous n’avez pas négligé pour autant de tirer les élèves vers le haut et de viser pour eux l’excellence. La réputation de l’Etablissement en témoigne.

         Quant au caractère propre, à l’identité catholique – qui n’est pas le repli sur soi, mais la volonté d’assumer et d’assurer la mission ecclésiale qui incombe à nos écoles de vivre de l’Evangile de Jésus Sauveur et de l’annoncer, en proposant la catéchèse, dans le respect de la liberté de chacun – vous y avez oeuvré, conformément à votre foi et à la mission que l’évêque vous avez confiée. Même si, vous et moi le savons bien, la tâche reste ardue et qu’on ne fait pas toujours ce qu’on voudrait faire... Ce qui est vrai pour un directeur d’Ecole catholique l’est d’abord pour les parents catholiques, pour les prêtres et aussi pour l’évêque ! Nous devons reconnaître humblement que nous ne sommes pas à la hauteur de la mission, tellement nous sommes dépourvus, faibles et – il faut bien le reconnaître – pécheurs...

         Au moment où vous quittez votre charge, François, votre successeur trouvera un Ensemble scolaire prospère, en bon état de marche, dont la réputation n’est pas à faire. Certes, il y aura des choses à parfaire, d’autres à inventer, comme dans toute institution humaine – et c’est encore plus vrai à notre époque où tout va à 100 à l’heure, où la société est confrontée à des enjeux et des défis considérables, et où, par conséquent, l’Ecole catholique doit être aux avant-postes, et doit pouvoir témoigner non seulement de l’espoir en un monde meilleur, mais plus encore de l’Espérance, de la grande Espérance,  dans un monde qui en manque cruellement, parce que son horizon se limite au « maintenant » et à « l’ici-bas ».

         L’un des objectifs qui me semble important pour l’avenir, et qui, comme pasteur du diocèse, me tient à coeur, sera celui d’oeuvrer à inscrire davantage nos écoles dans le paysage des communautés paroissiales et de la Communauté diocésaine. Non pas – je m’empresse de le dire – que cette dimension ait été absente de vos préoccupations et de votre engagement, mais parce que les récentes Orientations pastorales diocésaines, Pour une Eglise fraternelle, missionnaire et appelante, exigent un effort supplémentaire et des moyens nouveaux à mettre en oeuvre, afin que nos Ecoles soient encore plus partie prenante de la mission ecclésiale paroissiale et diocésaine. Dieu merci, je n’ai jamais constaté d’opposition, mais il y a encore du chemin à faire, des deux côtés, pour que les paroisses et le diocèse ne soient pas perçus comme des réalités juxtaposées à l’Ecole catholique et, pire encore, des réalités ignorées. C’est un défi parce que, précisément, nous ne sommes plus dans le contexte où la paroisse avait pignon sur rue. Mais l’Ecole catholique ne peut pas être complètement hors-sol !

         C’est d’ailleurs pour cette raison que j’ai souhaité que, dès l’an prochain, un prêtre de la paroisse devienne « référent », selon le terme utilisé dans les Statuts de l’E.C.. Mon souhait le plus cher était que cela se fasse dans la collaboration avec frère David qui accomplissait cette mission depuis deux ans, et qui avait succédé à frère Eric. Je m’en étais entretenu avec lui et avec son supérieur provincial. Cela n’a pas pu se faire et je le regrette, et je ne crois pas qu’il y ait eu de la mauvaise volonté de la part de qui que se soit. Cela n’empêchera pas, je l’espère, que les frères franciscains puissent garder des liens avec Edmond Michelet, comme ils entretiennent de bonnes relations, Dieu merci, avec les prêtres des paroisses de Brive et réciproquement. Nous avons encore du chemin à faire, je le répète, pour que tout le monde comprenne qu’il n’y a pas d’un côté la paroisse et le diocèse et de l’autre des institutions comme l’Enseignement catholique, ou tel ou tel mouvement ou association, mais que nous formons tous une famille unique, l’Eglise, où chacun a toute sa place, avec ses charismes propres, selon l’apostolat qui lui est propre et selon ses propres exigences internes. La diversité n’est pas contraire à l’unité de la foi et à la catholicité de l’Eglise, dès lors qu’on accepte de se respecter dans la variété des sensibilités et des appartenances qui peuvent constituer comme autant de facettes d’un même prisme, ou, pour le dire de manière plus poétique, comme autant de variétés de fleurs dans un champ printanier. La diversité dans l’Eglise ne doit pas signifier l’opposition et encore moins la division, mais l’accord de la foi, l’unité de la foi dans la communion de la charité.

         Puissions-nous, les uns et les autres, élèves, parents, enseignants, personnels divers, directeurs, pasteurs des paroisses, consacrés, travailler ensemble et de bon coeur dans la Vigne du Seigneur qu’est l’Eglise, et tout particulièrement pour vous, dans cette Communauté éducative d’Edmond Michelet, perle précieuse de la Communauté paroissiale et du diocèse, afin que chacun fleurisse et porte du fruit là où le Seigneur l’a planté. Que notre action de grâce avec vous et pour vous, François, nous tourne vers l’avenir pour continuer d’écrire de nombreuses et belles pages de ce livre qui nous tient tellement à coeur parce que l’Espérance de la moisson commence toujours avec la semence. Amen.

 

+ Francis Bestion

Evêque de Tulle

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