3 février 2019 - 4ème dimanche Temps ordinaire – année C — Diocèse de Tulle

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3 février 2019 - 4ème dimanche Temps ordinaire – année C

Sanctuaire de St-Antoine de Brive avec les Equipes Notre-Dame

         Frères et sœurs, je voudrais m'arrêter sur l'exhortation de saint Paul qui invite les chrétiens de Corinthe à rechercher les dons les plus grands. Cette invitation nous concerne aussi. En effet, les textes de la Sainte Ecriture ne cessent pas de s'accomplir pour ceux qui les lisent, quelque soit le lieu et l'époque à laquelle ils vivent. "Cette parole, elle s'accomplit aujourd'hui", dit Jésus après avoir lu le texte du prophète Isaïe à la Synagogue de Nazareth.

         Je reviens à saint Paul et à son exhortation : "recherchez les dons les plus grands". Après avoir dit cela, il précise aussitôt qu'il va indiquer le chemin par excellence, la voie supérieure à toutes les autres. Ce chemin, c'est celui de l'amour, de la charité. Et pourquoi est-il supérieur à toutes les autres voies ? Parce que c'est un don de Dieu. Il y a deux autres grands dons de Dieu ; ce sont la foi et l'Espérance. La foi et l'espérance nous sont données pour notre existence d'ici-bas. Croire et espérer nous permettent de trouver un sens à notre pèlerinage sur la terre. On croit en Dieu qui nous sauve et on espère en la vie éternelle. Mais, une fois le but atteint, à la fin de notre vie terrestre, il n'y aura plus besoin de foi et plus besoin d'espérance. Celui en qui nous avons mis notre foi, nous pourrons, si nous en sommes jugés dignes,  le contempler face à face pour l'éternité, même s’il nous faudra sûrement passer par un état de purification. Dans l’éternité, il n’y aura plus besoin de foi et d'espérance.

         Il n'en va pas de même du don de l'Amour. Il est la voie supérieure à toutes les autres, le chemin par excellence pour obtenir ce qu'il y a de meilleur, parce qu'il nous permet de ressembler à Dieu et, parce que, comme Dieu, l'amour est éternel : il ne passera jamais, dit saint Paul. Ce n'est pas par la foi et l'espérance que nous ressemblons à Dieu, car Dieu n'a pas besoin de croire et d'espérer. C'est en aimant que nous ressemblons à Dieu parce que Dieu est amour. L'amour n'est pas une qualité humaine ; il n'est pas non plus un attribut de Dieu parmi d'autres ; il est la substance même de Dieu. Voilà pourquoi l'Apôtre saint Jean, dans son évangile et ses épîtres, ne dit pas seulement que Dieu aime, mais il dit que "Dieu est amour". On ne peut dire cela d'aucun homme ni d'aucune femme. On peut dire que Pierre aime, que Jacques aime, que Marie aime, que Marthe aime, mais on ne peut pas dire que Pierre est amour, que Jacques est amour ou que Marie est amour. Dire que Dieu est amour revient à dire que ce qui constitue l'être divin, c'est l'amour. Ce n'est pas une qualité, c'est CE que Dieu est en lui-même. C'est sa nature.

         Donc, l'amour est ce qu'il y a de meilleur parce que si nous aimons, nous ressemblons à Dieu. Nous pouvons aimer parce que nous avons été créés à l'image de Dieu et parce que, malgré notre état de pécheurs, Dieu, par la grâce du baptême, nous a fait ce don précieux de l'amour. C'est un don de Dieu et, en même temps, c'est un don qui exige pour nous, pauvres pécheurs, de nous convertir sans cesse pour accueillir ce don et le traduire en actes concrets dans notre vie quotidienne.

         C’est vrai d’abord au sein de la famille, entre conjoints, entre parents et enfants, entre membres de la même fratrie. C’est dans cette petite « Eglise domestique » qu’est la famille « que mûrit la première expérience ecclésiale de la communion d’amour entre les personnes, où se reflète, par grâce, le mystère de la sainte Trinité » (Amoris Laetitia, n° 86). Ce que saint Paul dit au sujet de la charité – « elle est patiente, elle est serviable, elle n’est pas envieuse, elle ne fanfaronne pas, elle ne cherche pas son intérêt, elle ne s’irrite pas, elle ne tient pas compte du mal, elle ne se réjouit pas de l’injustice, elle met sa joie dans la vérité, elle excuse tout, elle croit tout, elle espère tout, elle supporte tout » - cela se vit et se cultive dans la vie que partagent tous les jours les époux, entre eux et avec leurs enfants. Et de manière très concrète, cela se traduit, comme aime le dire le pape François, par l’usage répété, chaque jour, de trois mots : « s’il te plaît » qui marque le respect de l’autre, « merci » qui écarte l’égoïsme, et « excuse-moi » ou « pardon » qui guérissent les blessures. C’est bien tout cela qui permet la croissance de l’amour dans la famille, car un amour qui ne grandit pas est un amour en danger. Les sentiments peuvent bien sûr changer au fil des ans – c’est vrai entre les époux, c’est vrai vis-à-vis de leurs enfants, c’est vrai entre frères et sœurs – mais ce qui est appelé à durer tout en se construisant sans cesse, c’est la charité, comme expression véritable de l’amour conjugal et familial. Et c’est cette charité qui devient témoignage, qui fait que la famille, dans son existence même, parle de Jésus et de l’Evangile. Le pape François exprime cela lorsqu’il écrit, dans « La joie de l’Amour » : « les couples chrétiens peignent le gris de l’espace public, le remplissant de la couleur de la fraternité, de la sensibilité sociale, de la défense de ceux qui sont fragiles, de la foi lumineuse, de l’espérance active. Leur fécondité s’élargit et se traduit par mille manières de rendre présent l’amour de Dieu dans la société » (n° 184).

         Frères et sœurs, ce qui est vrai de chaque baptisé, ce qui est vrai de chaque famille, ce qui est vrai d’une communauté de familles, comme celle des Equipes Notre-Dame, l’est aussi des communautés chrétiennes et de l’Eglise, comme famille de familles. Chacun de nous peut bien sûr s’appliquer à lui-même l’exhortation de saint Paul dans l’hymne à la charité, chaque famille peut faire sienne ces paroles, mais sans oublier que saint Paul s’adresse à une communauté chrétienne, celle de Corinthe, et à travers elle à toutes les communautés, à l’Eglise tout entière qui s’incarne dans l’Eglise diocésaine et dans chacune des Communautés locales qui la composent.

         Comme Jésus à Nazareth, l’Eglise va son chemin et elle passe au milieu des hommes et des femmes de ce monde, au milieu de la société dans laquelle elle est immergée. Comme Jésus, elle se heurte à l’incompréhension de ses contemporains, et d’autant plus que ses membres, à la différence de Jésus, ne sont pas exempts de péchés, de faiblesses, de travers de toutes sortes. Ce n’est pas pour autant qu’elle doit renoncer à sa dimension prophétique, mais cela supposera toujours que les membres de l’Eglise recherchent la cohérence de vie entre l’annonce de l’Evangile et la vie concrète de charité – charité entre eux et envers tous les autres. Nous expérimentons tous – l’évêque comme les autres – que cette cohérence de vie est la condition première et ultime de la crédibilité de l’Eglise en ce monde. C’est tellement vrai que même la semence du sang des martyrs n’est féconde que parce que leur témoignage de foi est inséparablement témoignage de charité. Le Christ n’a pas sauvé le monde parce qu’il a été crucifié, mais parce qu’en étant crucifié, il a offert sa vie par amour pour les hommes, y compris pour ses propres bourreaux. La victoire de la croix, c’est la victoire de l’amour.

         Frères et sœurs, demandons la grâce de grandir toujours plus dans la charité, au sein de nos familles, de  nos communautés, de l’Eglise, de telle sorte que ce brasier de la charité réchauffent tous les cœurs et embrase l’humanité de la charité de Dieu. Amen.

        

 

+ Francis Bestion

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