6 mars 2019 - Mercredi des Cendres — Diocèse de Tulle

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6 mars 2019 - Mercredi des Cendres

Cathédrale de Tulle

 

         « Tu aimes toutes tes créatures, Seigneur,

         et tu ne méprises rien de ce que tu as créé ;

         tu oublies les péchés de ceux qui se convertissent

         et tu leur pardonnes,

         parce que tu es le Seigneur notre Dieu »

        

         Frères et soeurs, c’est par cette parole émouvante, tirée du livre de la Sagesse, que la liturgie introduit aujourd’hui la célébration eucharistique, dans ce qu’on appelle l’antienne d’ouverture de la messe. Ces paroles ouvrent ainsi l’itinéraire du Carême, en plaçant à sa base la puissance infinie d’amour de Dieu, sa souveraineté sur toute créature, laquelle se traduit par une indulgence sans limites. En effet, pardonner à quelqu’un revient à lui dire : je ne veux pas que tu meures, mais que tu vives ; je veux ton bien pour toujours.

         Chers amis, c’est bien cette certitude qui a animé et soutenu Jésus durant ses 40 jours et ses 40 nuits au désert, après le baptême reçu de Jean, au Jourdain. Ce long temps de solitude et de jeûne a été pour lui un abandon total à son Père et à son dessein d’amour. Vivre ainsi dans le désert, seul, signifiait s’exposer volontairement aux assauts de l’ennemi, au tentateur ; cela signifiait pour lui engager le combat avec pour seules armes la confiance sans limites dans l’amour tout-puissant du Père dont rien ne pourrait le séparer. Voilà la conviction qui habitait Jésus au plus profond de lui-même durant son Carême : « Père, ton amour me suffit, je me plais dans ta volonté ». C’est un choix humble, bien en harmonie avec son incarnation et son baptême au Jourdain au milieu de la foule des pécheurs.

         Alors, aujourd’hui, en entrant nous-mêmes dans le Carême, il faut que nous nous souvenions que tout cela le Seigneur Jésus l’a fait pour nous ! Il l’a fait pour nous sauver et, en même temps, pour nous montrer le chemin à suivre. Le salut est un don gratuit que nous ne méritons pas, mais pour qu’il ait des effets dans mon existence, il requiert mon consentement, mon accueil, ma docilité, dans la volonté de vivre comme Jésus, de marcher à sa suite. Suivre Jésus au désert est la condition pour participer à sa Pâque, à son exode. Adam avait été chassé du paradis, à cause de sa désobéissance, de sa rupture de communion avec son créateur ; pour retrouver cette communion avec Dieu, il faut maintenant traverser le désert, il faut vivre l’épreuve de la foi. Mais pour cela, nous ne sommes pas seuls ; nous sommes avec Jésus. Il nous a précédés et il a vaincu l’esprit du mal ; il a triomphé du tentateur. Voilà donc le sens du Carême : renouveler le choix de suivre Jésus, sur un chemin de confiance et d’humilité pour participer à sa victoire sur le péché, le mal et la mort. Nous montons vers Pâque !

         Voilà qui nous permet de mieux comprendre le sens du signe pénitentiel qui inaugure, aujourd’hui, notre route de carême : le signe de l’imposition des cendres sur nos fronts. C’est un geste d’humilité qui signifie : je me reconnais une créature fragile, faite de terre et destinée à la terre, mais une créature faite à l’image de Dieu et destinée à Lui. Une créature façonnée par son amour, animée par son souffle vital, capable de lui répondre librement, mais aussi capable de lui désobéir, en cédant à la tentation de l’auto-suffisance et de l’orgueil. Voilà la maladie mortelle qui est entrée très tôt dans l’âme humaine, alors qu’elle était faite pour rendre grâce Dieu, son Créateur. L’homme a perdu son innocence, mais grâce à Jésus, il peut redevenir juste, juste de la justice divine, la justice de la miséricorde.

         Saint Paul affirme que Celui qui n’avait pas connu le péché – Jésus, le Fils fait homme – Dieu « l’a fait péché pour nous », afin qu’en lui nous puissions devenir justes. Dieu a porté son dessein de salut jusqu’en ses conséquences les plus extrêmes, en demeurant fidèle à son amour, même au prix d’accepter que son Fils soit livré à la mort.

         Frères et soeurs, le Carême ouvre vraiment notre horizon ; il nous oriente vers la vie éternelle. Ici-bas, nous sommes en pèlerinage, « car la cité que nous avons ici-bas n’est pas définitive » (He 13, 14). Le carême nous fait comprendre le caractère relatif des biens terrestres, même si nous avons besoin d’eux pour vivre ; il nous rend capable d’accomplir des sacrifices pour nous libérer et accomplir le bien. Surtout le carême nous offre la grâce du pardon : « laissez-vous réconcilier avec Dieu » - telle est l’exhortation de saint Paul qui se présente comme ambassadeur du Christ pour nous convaincre de cette grâce de la réconciliation, à notre portée. Grâce à la mort et à la résurrection de Jésus, le jour terrible de Dieu dont parlait le prophète Joël s’est transformé en jour du salut ! N’endurcissons pas notre coeur, mais laissons-nous envelopper tout entiers de la grâce miséricordieuse du Seigneur. L’appel à la pénitence, à la conversion résonnent aujourd’hui avec force pour que son écho nous accompagne tout au long de ce carême et chaque instant de notre vie.

         Le temps du carême est un temps « eucharistique ». Nous pouvons puiser à la source intarissable de l’amour qui se manifeste dans l’eucharistie où le sacrifice rédempteur du Christ est actualisé. Les oeuvres de charité, la prière et le jeûne, en même temps que tout autre effort sincère de conversion, trouveront leur plus haute signification dans l’eucharistie, source et sommet de la vie chrétienne.

         Demandons à la Marie de nous accompagner afin qu’au terme du Carême, nous puissions, intérieurement renouvelés et réconciliés avec Dieu et nos frères, contempler le Seigneur ressuscité. Amen.

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