30 septembre 2019 - Messe pour le Président Jacques Chirac — Diocèse de Tulle

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30 septembre 2019 - Messe pour le Président Jacques Chirac

Cathédrale de Tulle

« Seigneur, nous ne savons pas où tu vas. Comment pourrions-nous savoir le chemin

Cette parole de l’Apôtre Thomas, dans l’Evangile selon saint Jean, exprime d’une certaine manière la situation de l’Homme devant la vie et la mort, son questionnement fondamental quant au mystère de sa condition ici-bas et celui de sa destinée par delà la mort.

Depuis la nuit des temps, toutes les civilisations, toutes les religions de l’humanité ont été et sont traversées par le questionnement au sujet de l’origine et de la fin de l’Homme, et toutes ont exprimé leur incompréhension devant le scandale de la souffrance, du mal et de la mort.

La Révélation biblique, dans des pages comme celles du livre de Job, dont nous venons d’écouter un court extrait, laisse souvent jaillir le cri des hommes vers le Ciel, leurs doutes et angoisses, mais finalement aussi leur Espérance, face à cette pierre d’achoppement. Leur Espérance et pas seulement leurs espoirs ! Et à plus forte raison lorsque cette espérance naît dans une existence, comme celle de Job, éprouvée par des malheurs de toutes sortes. Le réalisme biblique, loin de tout spiritualisme éthéré, affronte avec lucidité le mystère de la condition humaine, de la destinée de l’Homme, dont la mort biologique constitue l’épreuve ultime mais sûrement pas l’anéantissement. Celui qui a créé l’Homme dans un acte de pur amour pourrait-il laisser son œuvre tomber dans le néant ? L’Evangile du Christ qui constitue la fine pointe de la Révélation, non seulement nous dévoile la Source de toute espérance, mais il en indique en même temps le chemin ; et ni l’une ni l’autre ne sont des idées abstraites, des concepts métaphysiques, mais une Personne, Jésus-Christ, le Fils de Dieu : « Moi, je suis le chemin, la vérité et la vie ». Par le don de sa vie sur la Croix et par sa résurrection, il met fin à l’emprise de la mort et il ouvre le chemin d’une vie éternelle pour tous ceux et celles qui se tournent vers Lui : « Dans la maison de mon Père, il y a de nombreuses demeures ».

Cette espérance d’une vie éternelle, loin d’être une cause de passivité pour notre existence terrestre, constitue au contraire la source d’un questionnement sérieux et responsable : « que puis-je faire de ma vie ? Que vais-je faire de ma vie ? ». La foi et l’espérance ne sont pas des anesthésiants pour supporter tant bien que mal les épreuves inhérentes à la condition humaine, mais un ressort puissant pour que chacun, selon ses possibilités, ses dispositions naturelles, mais aussi sa volonté, puisse se mettre au service des autres, selon le commandement évangélique.

Le service des autres : c’est bien de cette manière que la vocation des hommes et des femmes politiques et leur mission indispensable, dans la cité, dans la société – que ce soit à l’échelon local ou national – prend tout son sens et peut même revêtir une dimension quasiment transcendante, dans la mesure où elle peut rejoindre le dessein divin et contribuer au bien de l’humanité voulu par Dieu.

La politique est une activité, et on peut même dire un art, difficile certes, mais très noble, qui requiert le sens de la responsabilité, de la justice, de la bonté, de la solidarité et par dessus tout le dévouement au bien commun pour que se réalise la communauté politique, laquelle existe précisément dans le but du bien commun. Si par malheur, l’autorité publique en venait à oublier cette nature et cette fin de la communauté politique, alors elle ferait le lit de troubles futurs et de graves désordres dans la Nation. Ce danger est particulièrement présent dans notre société où l’individu et non le collectif tend de plus en plus à devenir la référence et la norme ultime.

 

La vie politique du Président Jacques Chirac, pendant plus de 40 ans, s’est inscrite pleinement dans cette dimension du service pour le bien commun, ici en Corrèze, à Paris, et, plus largement, pour notre pays, dans des charges parlementaire, ministérielles et finalement comme Chef de l’Etat. Il aimait son pays et, indissociablement, les personnes, ses concitoyens, ses compatriotes, en voulant le meilleur pour tous. Même si nous savons bien que l’art de gouverner doit souvent se contenter du possible sans pouvoir atteindre le meilleur.

Qu’est-ce qui inspirait l’action, l’engagement, le sens du service du Président Chirac ? Ses racines corréziennes – avec tout ce que cela sous-tend – qui ont fait de lui un homme solide, le maintenaient aussi dans une grande discrétion pour tout ce qui touchait à sa vie personnelle et tout ce pour quoi une certaine réserve imposée par ses fonctions était nécessaire. Mais ceux et celles qui l’ont connu de près n’ont pas de raison de penser que son action au service de ses concitoyens, dans les plus hautes fonctions qui furent les siennes comme dans sa vie ordinaire, ait été étrangère aux valeurs inspirées de l’Evangile.

Aujourd’hui, en célébrant l’eucharistie pour lui, nous remettons Jacques Chirac à la miséricorde de Dieu, car nous savons que toute personne, au moment de paraître devant le Juge des vivants et des morts, doit davantage compter sur cette miséricorde divine que sur ses propres œuvres. Et nous prions le Seigneur pour qu’il éclaire chacun de nos cœurs et nous donne suffisamment de liberté et de volonté, chacun dans le chemin qui est le sien, afin que nous soyons capables d’entendre les appels qui nous sont adressés et d’y répondre en nous mettant au service de nos semblables. Amen.

 

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