Messe du Samedi - Pèlerinage à Lourdes 2018 — Diocèse de Tulle

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Messe du Samedi - Pèlerinage à Lourdes 2018

Messe « Marie, Secours des malades »(p. 294 : Missel marial)

 

« La première en chemin, Marie, tu nous entraînes... » Ce sont là les paroles d’un cantique à la sainte Vierge, paroles toujours de circonstance et plus encore lorsque nous sommes entraînés en pèlerins, ici dans la cité de Lourdes où Marie est apparue à Bernadette.

On redécouvre aujourd’hui l’attrait pour les pèlerinages, et c’est heureux car le fait de quitter sa maison, de se mettre en marche, de se faire pèlerin pour se rendre dans un lieu saint est quelque chose que toutes les grandes religions de l’humanité connaissent. Il y a là quelque chose de profond inscrit dans l’histoire religieuse de l’humanité.

Pourquoi l’homme se fait-il pèlerin ? Parce qu’il porte en lui le désir de Dieu ! C’est un désir caché, inscrit par le Créateur au plus profond de l’être de la créature humaine. Si le désir de Dieu est inscrit en tout homme, il faut se mettre en marche pour le trouver, il faut se faire pèlerin, et le pèlerinage vers un lieu saint, un sanctuaire n’est que le symbole du pèlerinage le plus essentiel qui lui se passe à l’intérieur de nous-mêmes. Se mettre en marche, au sens propre et figuré, c’est ce qu’on fait les grands hommes de la Bible : Abraham s’est mis en marche ; parlant de lui, l’épître aux Hébreux dit que « c’est par la foi qu’obéissant à l’appel, il partit sans savoir où il allait ». Moïse se mit en marche pour répondre à l’appel de Dieu lui confiant la mission de faire sortir son Peuple de l’esclavage et de l’amener vers la Terre promise. Elie, le prophète, se mit en marche, comme tous les prophètes par la suite se mirent aussi en marche pour parler au nom du Seigneur. Après l’Ascension et la Pentecôte, les
Apôtres se mirent en marche.... Le résultat ? L’Evangile est arrivé jusqu’à nous ! Et aujourd’hui encore, ça continue : des hommes et des femmes se mettent en marche pour suivre le Christ, pour chercher Dieu.

Tout être humain est donc appelé à ce pèlerinage intérieur pour se mettre à la recherche de Celui qui l’attend, pour se mettre en quête de Dieu et se laisser trouver par Dieu. Rien, absolument rien, ne peut apaiser cette soif d’Absolu inscrite dans le cœur des êtres humains et qui signifie la marque, l’empreinte du Créateur. Rien ne peut l’assouvir si ce n’est justement la rencontre avec Dieu. Seul Dieu est absolu et « l’absolutisation de ce qui n’est pas absolu mais relatif s’appelle totalitarisme » disait le Pape Benoît XVI. On pourrait ajouter que l’absolutisation de ce qui n’est pas absolu conduit aussi à l’idolâtrie et à l’esclavage. Au cours des siècles, il s’est toujours trouvé de telles formes d’absolutisation, dont les dernières ont été les idéologies athées du XX° siècle qui ont causé tant de misère et de souffrance. Si ces idéologies se sont effondrées, d’autres leur ont succédé, qui ont pour nom : sécularisme et laïcisme. Deux sortes de rouleaux compresseurs dans nos sociétés actuelles, partout dans le monde. Certes de grandes et belles choses se réalisent dans nos sociétés, notamment dans le sens de plus de solidarité, mais en même temps, des risques sont pris sans considération au mépris de la dignité de l’homme, traité à l’instar de tout autre être vivant, comme si rien de spécifique ne le différenciait des plantes et des animaux. Les mentalités en sont transformées. Des sources de sens et de vérité sont occultées et obstruées. Chez beaucoup, la conscience s’en trouve anesthésiée, l’aspiration à cette recherche de Dieu dont je parlais à l’instant, se trouve étouffée, et l’horizon se rétrécit. Combien qui ne s’investissent que dans la recherche de satisfactions passagères ! Combien qui estiment que tout est relatif et qu’il n’y a pas de vérités éternelles ! Combien dont l’ambition n’est point de plaire au Seigneur mais de se faire plaisir à eux-mêmes, dont la perspective n’est point de s’accomplir en Dieu, mais de s’assouvir sur le lieu de leur éphémère passage.

L’Eglise, et donc nos communautés paroissiales, chacun et chacune d’entre nous, comme membre de cette Eglise, nous portons une grande responsabilité, celle d’être des veilleurs et des éveilleurs. Il ne s’agit pas de nous croire meilleurs que les autres, de vouloir faire la leçon aux autres, mais, à la suite d’Abraham, de Moïse, des Prophètes, à la suite de la Vierge Marie et des Apôtres, de tous les saints, de devenir des pèlerins de l’Espérance pour notre monde, de devenir des témoins de l’Invisible. Si la Vierge Marie est apparue dans de nombreux lieux à travers le monde, et si beaucoup de lieux de pèlerinages sont des sanctuaires marials, comme ici à Lourdes, c’est parce que Marie veut nous inviter à nous mettre en marche pour devenir, comme elle, lorsqu’elle rendait visite à sa cousine Elisabeth, des témoins de l’Invisible, des témoins de la Bonne Nouvelle du Salut, pour que nous reconnaissions en nos vies – nos pauvres vies souvent malmenées par toutes sortes de difficultés, d’épreuves... – la présence de l’Invisible et que nous devenions, comme elle, des porteurs de l’Invisible, des ostensoirs du Christ !

Pèlerins pour chercher Dieu et en témoigner, nous le sommes aussi pour le célébrer. Ce sens de la célébration dans le pèlerinage exprime une vérité profonde de notre foi : on ne peut pas être chrétien tout seul, on ne peut pas se faire sa petite religion dans son coin ; c’est toujours en Eglise qu’on est chrétien, qu’on vit sa foi, qu’on cherche à construire une société meilleure. Certes, l’Eglise n’est pas parfaite et elle est critiquée. N’est-elle pas, selon la parabole de l’évangile, comparable à un filet avec de bons et de mauvais poissons, ou un champ avec le bon grain mais aussi l’ivraie ! Mais, lorsque nous nous rassemblons au nom du Christ, nous sommes l’Eglise, et même avec tous ses défauts, qui sont les nôtres aussi, nous pouvons « espérer nous trouver encore à la suite de Jésus, qui a précisément appelé des pécheurs » (Benoît XVI). C’est dans la célébration de l’eucharistie que ce rassemblement des chrétiens atteint son sens le plus profond, car il devient alors COMMUNION.

Enfin, la démarche du pèlerinage est aussi une démarche pénitentielle. C’est ainsi d’ailleurs que sont nés ou sont devenus célèbres bien des lieux de pèlerinages au Moyen Age. On allait à Rome, à Saint- Jacques-de-Compostelle, à Rocamadour et dans bien d’autres sanctuaires, pour faire pénitence, pour obtenir le pardon de ses péchés, pour réparer le mal qu’on avait commis, pour se convertir. Ici, à Lourdes, la symbolique du pèlerinage indique un aspect profond et essentiel de la vie chrétienne : la conversion du cœur. C’est un thème central du message de la Vierge. Etre chrétien, c’est en fait le devenir ; le baptême a fait de nous des enfants de Dieu, mais cette grâce demande à être accueillie chaque jour. Suivre le Christ c’est un chemin, une marche et celui qui n’avance pas recule... Nous savons bien que c’est exigeant, qu’il faut faire des choix, renoncer à soi-même, à son égoïsme ; apprendre à la suite du Maître à se donner soi-même, à devenir des hommes et des femmes de vérité, de bonté, de pardon, de miséricorde.

Dans cette démarche pénitentielle, c’est-à-dire de conversion, nos yeux se tournent bien sûr vers le Christ et sa croix, mais aussi vers l’humble servante de Nazareth dont le cœur de Mère est transpercé du glaive de la souffrance ; nos yeux se tournent aussi vers l’immense cortège des saints et des saintes qui sont comme « le sillon lumineux de Dieu que lui-même a tracé au long de l’histoire et qu’il trace encore ». Les saints sont des personnes qui n’ont pas cherché d’abord et avant tout, obstinément, leur propre bonheur, mais qui ont voulu se donner parce qu’ils ont été touchés par le Christ. Ils nous montrent donc la route pour être heureux, pour devenir des hommes et des femmes vraiment humains.

 

Nous allons dans quelques instants entrer dans le cœur de la célébration eucharistique où se réalise le mémorial du mystère pascal, c’est-à-dire le mémorial de la mort et de la résurrection du Christ. Ce mystère n’est pas un à côté de la vie réservé à quelques chrétiens plus pieux que les autres. L’eucharistie est le mémorial de la Croix, la croix du Christ où se réalise l’acte central de transformation qui est seul en mesure de transformer vraiment le monde : c’est là que la violence se transforme en amour et donc la mort en vie. Là la mort est déjà dépassée puisqu’elle est transformée en amour, et donc la résurrection est déjà présente en elle. C’est cette transformation fondamentale de la mort en vie qui permet au Christ de dire déjà la veille de sa mort : « Ceci est mon corps, ceci est mon sang » ; le pain et le vin deviennent vraiment son Corps et son Sang. Et à chaque eucharistie où se réalise le sacrifice de la croix, le Corps et le Sang du Christ nous sont donnés afin que nous soyons, à notre tour, transformés. Nous devons devenir ce que nous recevons, c’est-à-dire le Corps du Christ. La transformation que nous subissons doit alors se propager aux autres et s’étendre au monde entier. Ce n’est pas de la fiction ; c’est une réalité certaine si nous y croyons, si nous le vivons. L’Eucharistie n’est pas un à-côté de la vie, puisqu’elle est capable de transformer notre vie et celle du monde. Cela doit se voir dans notre capacité de pardonner, dans notre attention aux besoins des autres, dans notre compassion, dans notre souci de partager. Cela doit se manifester dans notre engagement envers les autres, ceux qui sont proches et ceux qui sont loin. Nous ne devons pas passer à-côté de ceux qui sont dans la détresse, dans la solitude.

 

Vierge bénie, en nous entraînant à la suite de ton Fils, tu veux que nous connaissions le bonheur d’être ses disciples. Ta naissance, Vierge sainte, fit lever sur le monde l’espérance et l’aurore du Salut ; par ton intercession, nous demandons aujourd’hui pour chacun et chacune d’entre nous cette même espérance puisque le salut est venu dans le monde en la personne même de Jésus. Vierge bénie, soutiens nos combats quotidiens, soutiens notre pèlerinage de la foi sur cette terre !

 

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