31 mars 2018 - Vigile pascale — Diocèse de Tulle

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31 mars 2018 - Vigile pascale

Cathédrale de Tulle

Frères et sœurs, depuis le commencement de l’humanité, les hommes et les femmes de ce monde ont rêvé d’immortalité. De tous les êtres vivants, l’homme est le seul qui sache qu’il doit mourir un jour. Et cette pensée, cette certitude ne le laisse pas tranquille parce qu’en son âme réside un désir profond – qui est bien plus que l’instinct animal de survie, commun à toutes les espèces animales –, un désir d’une vie qui pourrait échapper à la loi inéluctable de la mort.

N’est-ce pas, au fond, ce désir de vie, d’immortalité, d’éternité – bien plus que d’une simple survie – qui a conduit au rêve de découvrir un jour un remède dans quelque substance inconnue qui se trouverait quelque part dans des micro-organismes cachés au sein des forêts primitives ou dans les grands fonds des océans ? Ce rêve s’exprime aujourd’hui sous une autre forme, moins bucolique, celle du transhumanisme, de ‘l’homme augmenté’, c’est-à-dire de l’homme réparé et perfectionné, en espérant qu’il puisse échapper au vieillissement naturel et donc à la mort. Mais, de l’herbe médicinale contre la mort aux projets fous des bio-technologies, n’est-ce pas le même rêve de survivre qui se manifeste, bien plutôt que le désir d’éternité inscrit en nos âmes ? Le vrai remède d’immortalité ne devrait-il pas consister à créer en nous une vie nouvelle, réellement capable d’éternité ?

Frères et sœurs, la nouveauté absolument inouïe de l’Evangile, c’est que le vrai remède d’immortalité existe et que, contrairement aux succédanés improbables de survie, il est accessible à tous ! Ce vrai remède, douze adultes parmi nous vont le recevoir cette nuit. Par le baptême, une vie nouvelle – celle-là même qui a fait sortir Jésus du tombeau – va commencer en eux, une vie qui ne sera pas effacée par la mort biologique, la mort de la vie ancienne, mais qui, seulement alors, sera portée pleinement à la lumière.

« Comment cela peut-il se faire », pourrions-nous demander. C’était aussi la question de la jeune vierge Marie de Nazareth à l’Ange Gabriel, lors de l’annonciation. Et nous nous souvenons de la réponse : « rien n’est impossible à Dieu » !

La liturgie baptismale, dans quelques instants, nous donnera à voir un signe qui manifeste ce qui advient par le baptême : les nouveaux baptisés seront revêtus d’un habit blanc – un nouveau vêtement sur leur corps mortel, et ils entendrons une parole accompagnant ce signe : « désormais, tu es une création nouvelle dans le Christ ; tu as revêtu le Christ ». Le voilà le vrai remède d’éternité : le Christ, Fils de Dieu, ressuscité d’entre les morts ! Ce qui se produit au baptême est le commencement d’un processus qui embrasse toute notre vie, qui nous rend capable d’éternité. Dans l’habit de lumière et de gloire de Jésus-Christ ressuscité, nous sommes déjà transfigurés, rendus capables d’apparaître devant Dieu et de vivre avec lui pour toujours. C’est ce que m’écrivait l’un de nos catéchumènes : « je n’appréhende pas la mort, mais j’ai envie de croire à la vie éternelle et au paradis ». Ce soir, Dieu va exaucer sa demande.

Avant de recevoir ce vêtement blanc, et avant que l’eau n’ait coulé sur leur tête, les catéchumènes auront renoncé à Satan et à ses œuvres, au mal et au péché. Par ce triple renoncement, ils ôteront les « vêtements anciens » avec lesquels on ne peut pas se tenir devant Dieu. Disons plutôt qu’ils commenceront à les quitter. Car « ce renoncement est une promesse dans laquelle nous tenons la main du Christ, afin qu’il nous guide et nous revête lui-même du vêtement du salut » (Benoit XVI). Viendra ensuite la proclamation de la foi de l’Eglise : « je crois à la résurrection de la chair et à la vie éternelle ». Jésus a dit : « celui qui croit en moi a la vie éternelle et moi, je le ressusciterai au dernier jour ».

Dans l’Eglise primitive, après le triple renoncement et la proclamation de la foi, celui qui allait être baptisé enlevait réellement ses vêtements et il descendait dans le baptistère ; là, il était immergé entièrement (sa tête était sous l’eau), par trois fois. Pour signifier que sa vie, vouée à la mort, il la remettait au Christ, pour qu’avec Lui, par Lui et en Lui, il puisse passer de la mort à la Vie. Puis, c’est en sortant de la piscine baptismale qu’il revêtait le vêtement blanc, vêtement de lumière.

Chers catéchumènes, vous ne descendrez pas cette nuit dans un baptistère, car il n’y en pas dans cette cathédrale et que les rites ont évolué depuis, mais, c’est le même baptême : par trois fois, je verserai de l’eau sur votre tête. Et là, vous comprendrez que vous avez reçu le remède de l’immortalité, que vous êtes protégés de la mort, en Celui qui a vaincu la mort et qui nous porte, à travers la mort, vers la vie éternelle. Et, au moment de la communion, vous recevrez le Corps et le Sang du Seigneur ressuscité pour devenir ce que vous recevez.

Oui, frères et sœurs, ce désir que nous portons en nous de l’éternité, ce n’est pas en vain que Dieu l’a inscrit dans notre être profond. Le remède contre la mort existe. L’arbre de vie qu’évoque le premier livre de la Bible, arbre de vie du jardin de la création, c’est le Christ lui-même, et par Lui, nous avons accès au fruit de l’immortalité. Le Seigneur ressuscité, premier-né d’entre les morts, nous ouvre à jamais la porte du jardin que le péché d’Adam et Eve avait refermée. Le Seigneur ressuscité nous donne la joie des ressuscités, celle de la vraie vie. C’est cette joie qui éclate en cette nuit très sainte, et qui s’exprime dans l’hymne de l’Exultet que nous avons chanté une fois entrés dans la cathédrale ; c’est la joie de l’Alléluia, louange au ressuscité, c’est la joie pascale.

Cette joie de la foi, de la vie éternelle, du salut, elle ne se commande pas. Nous la recevons et nous l’accueillons avec nos frères et sœurs néophytes. Nous ne voulons pas la garder pour nous, mais la communiquer autour de nous. Elle est le signe des témoins du Ressuscité. Amen.

 

+ Francis BESTION

Evêque de Tulle

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