9 septembre 2018 - Installation des curés — Diocèse de Tulle

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9 septembre 2018 - Installation des curés

23ème dimanche ordinaire – B - Cathédrale de Tulle

Frères et sœurs,

 

Nous avons l’habitude de lire les évangiles bribe par bribe, et rarement en entier. De ce fait, un certain nombre de choses peuvent devenir moins visibles. L’une d’elle, c’est l’extrême mobilité de Jésus, pendant les trois années de son ministère public. Elles sont vraiment nombreuses les notations des évangiles sur les déplacements de Jésus, d’un village à un autre, d’une ville à une autre, entre la Galilée et la Judée, mais aussi en Samarie et même dans des territoires païens, comme on le voit dans l’évangile de ce jour. On peut dire que le ministère de Jésus a été vraiment itinérant. Il n’a jamais cherché à s’établir en un lieu, et lorsqu’on a voulu le retenir, il s’est empressé de partir.

Jésus, avec ses Apôtres et les autres disciples qui le suivaient, dont un certain nombre de femmes, a vécu une sorte d’Exode permanent, un perpétuel état de sortie. C’est là une donnée des évangiles qu’on oublie parfois. Cette caractéristique traduit, je crois, une urgence de la mission, urgence qui empêche de s’installer durablement en un lieu. Cette itinérance a concerné aussi les premiers temps de l’Eglise, comme en témoigne le livre des Actes des Apôtres et les lettres de saint Paul. Les Apôtres et leurs successeurs ont obéi au commandement de Jésus : « Allez, de toutes les nations, faites des disciples ». Ce mouvement missionnaire s’est poursuivi au long des siècles, à tel point qu’on peut dire qu’il est une marque très forte de la nature de l’Eglise. Et lorsque la tentation du repli sur soi ou de l’installation menaçait les communautés, des Ordres religieux ont vu le jour pour que l’Evangile, la Bonne Nouvelle de Jésus Christ, continue sa course, encore et toujours. On peut penser aux moines qui durant tout le Moyen Age évangélisèrent les campagnes, dans toute l’Europe. Sur le territoire de notre diocèse, la présence de plusieurs églises abbatiales dit quelque chose de cette activité missionnaire intense. Ce furent ensuite l’apparition des grands Ordres religieux : les franciscains, les dominicains, plus tard les jésuites. Et, plus proches de nous, les spiritains, les Pères blancs, les Missions étrangères de Paris qui portaient le Christ en Asie, en Afrique et en Océanie. Et combien de congrégations religieuses féminines apostoliques déployèrent leurs membres jusque dans les coins les plus reculés des campagnes françaises et bien au-delà…

Aujourd’hui encore des communautés nouvelles voient le jour pour soutenir l’élan missionnaire de l’Eglise. Nous en bénéficions, puisque des prêtres de la Communauté Saint-Martin sont venus chez nous. Il y a aussi les nombreux prêtres venant de l’Etranger (principalement du continent africain) qui soutiennent, ici, en France, la mission dans tous les diocèses. Et c’est aussi le cas chez nous.

Frères et sœurs, l’Eglise se doit d’être toujours en sortie. C’est d’ailleurs ce que ne cesse de rappeler le Pape François lorsqu’il demande à tous les baptisés d’aller aux périphéries. Dans les pays de vieille chrétienté, comme la France, on a pu penser un temps que la mission ne concernait que les terres lointaines et que chez nous, dans les paroisses, il suffisait d’entretenir la vie chrétienne autour des nombreux clochers. L’Eglise s’était pour ainsi dire « installée », sédentarisée. Mais voilà que depuis des décennies déjà ce modèle est en train de voler en éclat. La révolution industrielle, marquant la fin des sociétés rurales traditionnelles, avec l’exode rural massif, ensuite la révolution post-industrielle, le bouleversement des modèles et des modes de vie, la mondialisation, et surtout la sécularisation et sa conséquence – l’oubli de Dieu – sont venus nous rappeler que l’Eglise ne peut pas s’installer, qu’on ne peut pas se contenter d’entretenir ce qui existe encore – j’allais dire qu’on ne peut se contenter de « sauver les meubles ». Les baptisés, les communautés chrétiennes doivent retrouver les réflexes de la mission, de l’évangélisation, de la sortie, de l’Exode, d’une certaine itinérance.

Les Orientations pastorales diocésaines s’inscrivent dans ce grand mouvement que les derniers papes ont initié et qui concerne tout particulièrement les Eglises du vieux continent européen. Il ne s’agit pas de « restructuration » comme on a pu le penser il y a quelques années dans la majorité des diocèses où on réorganisait les paroisses. Il s’agit bien plutôt de trouver un nouveau souffle missionnaire, un élan de foi – c’était le « slogan » de notre année jubilaire. Je dis « c’était » parce que l’année jubilaire touche à sa fin. Mais l’ « élan », lui, doit se poursuivre et surtout s’intensifier.

Les « Communautés locales » avec leur « Equipe d’animation Pastorale », dans chacun des 4 « Espaces missionnaires », sont appelées à vivre cet élan d’évangélisation, à chercher de nouveaux dynamismes, en dehors de toute nostalgie, au-delà de la répétition de ce qui existait par le passé. C’est une grande mutation que vit l’Eglise dans tous les diocèses ruraux, mais aussi dans les grandes villes, même si c’est différent. Cette mutation, on peut la voir comme une épreuve pour la foi – et, d’une certaine manière, c’en est une ! Mais il faut surtout la voir comme un appel du Seigneur, qui veut toujours faire jaillir l’eau dans le désert et les torrents dans les terres arides (nous avons entendu ces paroles dans la première lecture).

Les « fraternités locales missionnaires » ont aussi pour but de participer à cette dynamique missionnaire, tout comme les divers groupes qui existent, notamment ceux de la lecture méditée et priée de la Parole de Dieu. Certaines fraternités ont vu le jour, mais c’est encore embryonnaire. Il ne faudra pas baisser les bras.

L’autre pilier des Orientations, ce sont les « Fraternités presbytérales ». Elles sont constituées dans les quatre Espaces missionnaires, même s’il y a des situations provisoires ici ou là.

Dans l’Espace missionnaire de Tulle, la fraternité est constituée de 4 curés in solidum : l’Abbé Nicolas Risso, Modérateur, l’Abbé Yarek Kucharski (qui résidera à Argentat), l’Abbé Vincent Damian (actuellement absent pour cause de santé ; il doit subir plusieurs opérations ; nous prions pour lui) et l’abbé Bernard Zimmermann que vous connaissez bien. Il y a aussi un prêtre coopérateur, l’Abbé Rolland Néné (il faut que nous l’entourions de notre affection et de notre prière, car il vient d’apprendre hier matin le décès de son papa). Et puis, il y a un prêtre auxiliaire, l’abbé Jacques Tersou, que tout le monde connaît. Je n’oublie pas le diacre David Wosinsky qui ne sera pas là en permanence, car son parcours de Séminaire se poursuit encore jusqu’à l’ordination sacerdotale.

Je suis là aujourd’hui, avec vous tous, pour l’installation officielle des curés in solidum, comme le prévoit le droit canonique. Après ce que je viens de dire, vous comprenez que le mot « installation », même s’il reste valable du point de vue du droit, n’est sans doute pas le mieux approprié pour traduire la mission des curés – et plus largement de tous les prêtres –, telle que les Orientations diocésaines la dessine. Les Orientations évoquent un ministère d’itinérance pour indiquer que la mission des prêtres se comprend dans le cadre, non plus d’un clocher, ni d’un groupement de paroisse, mais dans un Espace missionnaire qui comporte plusieurs Communautés locales. Les curés doivent se répartir les diverses missions transversales dans cet Espace et surtout se répartir la mission auprès de chaque Communauté Locale. Ils sont curés in solidum, mais chacun est appelé à suivre plus particulièrement une ou deux Communautés Locales. C’est exigeant et je les remercie d’avoir accepté cette nouvelle manière d’exercer le ministère pastoral. Trois d’entre eux arrivent et doivent découvrir les réalités locales. Merci de les accueillir et de les soutenir dans leur mission. Comme collaborateurs de la mission de l’Evêque, ils sont envoyés vers les Communautés locales de l’Espace missionnaire de Tulle pour annoncer l’Evangile, enseigner, pour sanctifier le peuple chrétien par les sacrements et pour conduire les communautés. C’est la triple mission des Evêques d’abord et de leurs collaborateurs, les prêtres. Dans ce cadre qui est celui de la Tradition depuis les Apôtres, ils ont à inventer, pour aujourd’hui, de nouveaux modes de présence aux Communautés et aux personnes. La collégialité de leur ministère, la vie fraternelle entre eux (repas, prière, réunion hebdomadaire de travail) va leur demander de changer certaines habitudes de vie et de travail. Ils y trouveront – je le souhaite et eux aussi j’espère – une grande force, un souffle spirituel, des énergies nouvelles.

Chers frères et sœurs, aidez-les, aidez-les vraiment à vivre cette fraternité entre eux et avec vous ! Soutenez-les pour la prise en charge des Communautés. Soyez indulgents envers eux, n’exigez pas qu’ils soient partout en même temps et qu’ils fassent tout ! Permettez-leur d’avoir du temps pour aller vers ceux qui ne font pas partie de la communauté rassemblée, qui sont plus ou moins proches ou plus ou moins loin de l’Eglise. Permettez-leur d’être des missionnaires, c’est-à-dire des prêtres dont toute l’énergie n’est pas absorbée par le service de ceux qui ont déjà les deux pieds dans l’Eglise. Car il y a tous les autres, et Dieu sait s’ils sont nombreux, qui sont aux marges des Communautés et tous ceux qui ne connaissent pas le Christ. Aujourd’hui, les prêtres doivent, en partie, inventer une nouvelle manière de vivre leur ministère, qui soit adaptée à la situation qui est la nôtre ; et ils doivent aider les Communautés à devenir elles-mêmes missionnaires.

Personne n’a de solution toute faite, ni l’évêque, ni les prêtres, ni les membres des Equipes d’animation pastorale, ni les membres des communautés. Il faut chercher ensemble, il faut prier ensemble le Seigneur, pour qu’il nous donne son Esprit, l’Esprit de Pentecôte qui a fait sortir les Apôtres du Cénacle.

Chers frères prêtres, je vous encourage à être des prêtres appelants. C’est une des insistances des Orientations pastorales : devenir une Eglise appelante. Ce doit être le souci des Equipes d’Animation pastorale et de tout le monde.

Frères et sœurs, allons de l’avant, sans regarder en arrière, demandons la grâce de nous laisser travailler par l’Esprit Saint pour être ensemble, chacun selon ses charismes, son état de vie, ses fonctions dans l’Eglise, une Eglise fraternelle, missionnaire et appelante, afin que l’Evangile soit toujours annoncé et vécu. Amen.

 

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