13 juin 2018 - Fête de saint Antoine de Padoue — Diocèse de Tulle

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13 juin 2018 - Fête de saint Antoine de Padoue

Couvent des franciscains de Brive

 

« Quant à eux, ils s’en allèrent proclamer partout l’Evangile. Le Seigneur travaillait avec eux et confirmait la Parole par les signes qui l’accompagnaient ».

Frères et sœurs, bénissons le Seigneur que le propre liturgique des franciscains nous donne d’entendre pour cette fête de saint Antoine ces paroles qui sont les dernières de l’évangile selon saint Marc. Comment mieux résumer en quelques mots la vie de ce grand saint de l’Eglise qu’en lui appliquant ces paroles de l’évangile ? Ce qui a fait la réputation de sainteté de ce frère, contemporain de saint François, c’est bien, en effet, sa prédication et ses dons de thaumaturge. Il fut un infatigable prédicateur de l’Evangile et le Seigneur confirma la Parole par les signes qu’il lui donna d’accomplir de son vivant et après sa mort. C’est ce qui lui valut d’être canonisé un peu moins d’un an après sa mort, tellement étaient nombreux les miracles dus à son intercession pour les fidèles qui venaient en grand nombre prier sur sa tombe, à Padoue.

Ce jeune portugais n’entra pas dans l’Ordre des frères mineurs parce qu’il aurait été séduit par son fondateur. Il ne le connaissait pas. C’est par le Christ qu’il fut séduit et c’est ainsi qu’il entra chez les chanoines réguliers de saint Augustin, auprès desquels il poursuivit, pendant 8 ans, de très sérieuses études de philosophie, de théologie, d’Ecriture sainte et de patristique. C’est en voyant cinq religieux franciscains s’embarquer pour les Missions d’Afrique qu’il ressentit le premier appel à devenir disciple de saint François ; et l’appel fut définitif lorsque, quelques mois plus tard, les reliques de ces cinq religieux, devenus martyrs de la foi, furent apportées providentiellement au monastère où vivait Antoine. Il voulut, lui aussi, devenir franciscain, pour aller porter l’Evangile à ceux qui ne connaissaient par le Christ. Admis dans l’Ordre, il obtint de partir pour l’Afrique, mais à cause de la maladie, il dut bien vite revenir. En Italie, il était un inconnu. Personne ne faisait attention à ce frère, au Couvent de Forli, là où il avait été envoyé. Il s’adonnait à la contemplation et aux humbles tâches domestiques du couvent. Ce n’est qu’en prenant la parole en public pour quelques occasions fortuites qu’on découvrit ses talents d’orateur et de prédicateur et qu’on l’envoya prêcher dans les campagnes et les villes et aussi enseigner la théologie dans les universités de Montpellier, Toulouse, Bologne et Padoue. On commença à lui décerner les titres d’apôtre et de thaumaturge.

D’où lui venait tant de charisme et tant de succès ? Sans aucun doute, le Seigneur l’avait comblé, dès sa naissance, de dons exceptionnels, mais, par dessus tout, c’est la radicalité de l’Evangile qui l’avait séduit. De même que la parole que portaient les Apôtres au lendemain de l’Ascension et de la Pentecôte n’était pas leur parole mais celle de Jésus, la Parole de Dieu, de même que la force qui permettait de faire entendre cette Parole n’était pas leur force, mais la force de l’Esprit-Saint, eh bien, de même, on peut dire que la parole de frère Antoine n’était pas sa parole et la force de sa prédication n’était pas sa force. Comme le Seigneur avait travaillé avec les Apôtres en confirmant la Parole, il travaillait aussi avec son apôtre Antoine, en confirmant la Parole par des signes. Ainsi ce n’était pas leur puissance, ce n’était pas sa puissance qui manifestait l’Evangile, mais la puissance de Dieu à travers leurs voix et leurs actes.

Frères et sœurs, la fête de saint Antoine, aujourd’hui, doit nous conduire à mieux découvrir ce qui est le seul fondement de l’existence humaine, à savoir la Présence de Dieu à nos vies et sa Parole. En faisant mémoire de saint Antoine, nous faisons mémoire de cette grande réforme de la mission dans l’Eglise, initiée par saint François, vécue aussi, à la même époque, d’une autre manière, par les frères de saint Dominique. Dans un monde en train de s’enrichir par le développement du commerce, la naissance de la bourgeoisie, il s’agissait de manifester que Dieu est plus grand que ce monde, que Dieu est plus grand que chaque être humain, que Dieu est plus grand que toutes les idées et toutes les paroles, que Dieu est vraiment le tout de la vie de l’homme.

A la suite du saint de Padoue, nous sommes invités à découvrir la vraie richesse de notre vie, dans un monde où, tous, qui que nous soyons, sommes imprégnés, baignés et même « formatés », comme l’on dit maintenant, par une culture subvertie par l’argent et le profit. Même si nous ne sommes pas riches nous-mêmes, nous sommes menacés de nous laisser entraîner dans un système où la valeur des personnes est jugée à l’aune de leur réussite économique, financière, professionnelle et où le monde de l’économie décide de tout. Bien sûr, notre foi ne doit pas nous faire mépriser le travail et les fruits de ce travail, mais elle doit nous inviter à revenir sans cesse à ce qui est le cœur, c’est-à-dire le Christ et l’Evangile du Christ.

Aujourd’hui, nous rendons grâce au Seigneur pour ce que saint Antoine a donné à l’Eglise et au monde, à travers sa vie et, par là, nous reconnaissons que l’annonce de l’Evangile dans laquelle il excella par sa prédication était étroitement liée à la conversion de sa vie. On ne peut témoigner que le Christ a la première place dans notre vie, qu’il est le fondement de toute vie et de tout bonheur, qu’il est à la racine de toute activité, si nous nous appuyons sur autre chose ou sur quelqu’un d’autre que le Christ. Chacun et chacune d’entre nous, nous avons des conditions de vie, des contraintes, des charges, des devoirs, des missions à accomplir qui, sans doute, ne nous permettent pas de revêtir, comme Antoine, la robe de bure. Mais ce n’est pas ce que Dieu demande, du moins à la plupart d’entre nous.. Ce qu’il nous demande c’est de revenir au cœur de la foi, de chercher à travers nos activités, les évènements de notre vie, comment la volonté de Dieu se manifeste pour nous et de chercher comment sa Parole, l’Evangile du salut, est la première lumière à laquelle nous nous référons pour comprendre notre vie et pour l’orienter dans le bon sens.

Devant la croix de Jésus, faisons notre cette conviction de saint Antoine : « Le Christ qui est ta vie, est accroché devant toi, pour que tu regardes dans la croix comme dans un miroir. Là tu pourras voir combien tes blessures furent mortelles, qu’aucune médecine n’aurait pu les guérir, si ce n’est celle du Sang du Fils de Dieu. Si tu regardes bien, tu pourras te rendre compte à quel point sont grandes ta dignité humaine et ta valeur… En aucun autre lieu, l’homme ne peut mieux se rendre compte de ce qu’il vaut, qu’en se regardant dans le miroir de la croix ». Amen.

 

+ Francis BESTION

Evêque de Tulle

 

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