24 novembre 2018 - Obsèques du Chanoine Paul TRIADOU — Diocèse de Tulle

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24 novembre 2018 - Obsèques du Chanoine Paul TRIADOU

Eglise Saint-Sernin de Brive

 

Frères et sœurs, la célébration des obsèques d’un prêtre est la même que pour n’importe quel baptisé, parce qu’avant d’être prêtre celui que l’on accompagne par la prière au moment de son passage, de sa Pâque dans le Christ, est d’abord un baptisé. Sur lui ont coulé les eaux baptismales, sur son front a été répandue l’huile parfumée, le saint-Chrême, et son corps a été revêtu du vêtement blanc. Dans la première lecture, l’apôtre saint Pierre fait allusion très explicitement à cet événement premier de la vie du chrétien, lorsqu’il dit que « dans sa grande miséricorde, le Père de NSJC nous a fait renaître grâce à la résurrection de Jésus-Christ pour une vivante espérance, pour l’héritage qui ne connaîtra ni destruction, ni souillure, ni vieillissement ». Le baptisé c’est celui qui est rené de l’eau et de l’Esprit-Saint, celui qui a été plongé dans la mort de Jésus pour ressusciter avec lui. C’est cela la grande Espérance qui constitue en quelque sorte la toile de fond de la vie du chrétien en pèlerinage sur cette terre. C’est ce que nous rappellerons au moment du dernier adieu, à la fin de cette liturgie, lorsque j’aspergerai avec l’eau bénite le corps de notre frère. Cette eau est un rappel de l’eau du baptême.

Que faisons-nous aujourd’hui ? Que fait l’Eglise lorsqu’elle célèbre les funérailles d’un de ses enfants ? Elle célèbre le mystère pascal du Christ, sa mort et sa résurrection. Celui que nous accompagnons était devenu, par le baptême, membre du Christ mort et ressuscité. Et nous prions pour qu’il passe avec le Christ de la mort à la vie, qu’il soit purifié dans son âme et rejoigne au ciel tous les saints, dans l’attente de la Résurrection des morts et la bienheureuse espérance de l’avènement du Christ à la fin des temps.

Nous célébrons donc les funérailles d’un baptisé, comme les funérailles de tout baptisé. Cependant, ce baptisé était aussi un prêtre. C’est pour cela que le cercueil est tourné vers l’Assemblée pour signifier que c’est un pasteur que nous accompagnons de notre prière, comme si une dernière fois il voulait encore nous enseigner et nous guider.

Le père Paul Triadou avait répondu à l’appel du Seigneur, en choisissant de lui consacrer sa vie dans le ministère sacerdotal, au service de ses frères pour l’annonce de l’Evangile, la sanctification par les sacrements et la conduite du peuple de Dieu. C’est pour cela qu’il avait été ordonné prêtre le 4 mars 1944, par Mgr Amable Chassaigne. Ce ministère, il l’a exercé de manière active pendant de longues années, principalement au service des jeunes, à l’institution Bossuet où il fut professeur et ensuite Supérieur. Mais aussi comme curé dans 4 paroisses successives (cela a été rappelé au début de la messe), aussi comme directeur des pèlerinages, avant de rejoindre la Maison saint Joseph, en 2009. Lorsqu’on veut évoquer la vie d’un homme, d’un prêtre, on parle souvent de ce qu’il a fait, des responsabilités qu’il a exercées, des œuvres qu’il a réalisées. C’est ce qui est public, c’est ce qui se voit. Et quand cet homme, ce prêtre, a vécu longtemps – c’est le cas pour le chanoine Paul Triadou – la liste pourrait être longue. Et il faut en rendre grâce au Seigneur. Mais s’en tenir là, ce serait ne prendre en compte que ce qui est visible, ce qui est écrit, et, en fin de compte, on pourrait se demandait : cela suffit-il à caractériser vraiment la vie de ce prêtre ? Les confrères du Père Triadou qui sont ici savent bien que ce qui fait le cœur de la vie du prêtre, le cœur de son sacerdoce, le cœur de son ministère, ne peut pas se décliner en terme de poste, en terme d’emploi, de fonction, de charges. Le curé d’Ars disait que « le sacerdoce, c’est l’amour du cœur de Jésus ».

Premièrement, cela signifie l’Amour dont le prêtre est aimé par Celui qui l’a appelé, qui l’a choisi et qui l’a envoyé : « Je ne vous appelle plus serviteurs, je vous appelle mes amis » dit Jésus à ses Apôtres. Et cet Amour du Christ passe par le ministère du prêtre auprès des personnes vers lesquelles il est envoyé ; il est comme un instrument de cet amour qui le dépasse infiniment et devant lequel il se sent tout petit, indigne même, et jamais à la hauteur. C’est particulièrement perceptible pour lui lorsqu’il donne le pardon au nom du Seigneur, alors qu’il est lui-même un pauvre pécheur ! C’est parce qu’eux-mêmes sont des pécheurs pardonnés que les prêtres peuvent être les humbles ministres de la miséricorde divine. Les pénitents savent bien que la puissance de pardon ne vient pas d’eux mais du Seigneur. Il en va de même pour les autres sacrements, et tout particulièrement l’Eucharistie, car, comme le dit le Concile, elle contient tout le « trésor spirituel de l’Eglise, c’est-à-dire le Christ lui-même, lui notre Pâque, lui le pain vivant, lui dont la chair, vivifiée par l’Esprit et vivifiante, donne la vie aux hommes ». « Celui qui mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle, et moi, je le ressusciterai au dernier jour », dit Jésus dans le discours du Pain de vie, dans l’évangile de saint Jean. Nous venons de l’entendre. L’eucharistie est « la source et le sommet de l’évangélisation », comme le dit le Concile. C’est d’elle aussi que découle la charité pastorale qui doit animer la vie des prêtres. Voilà pourquoi l’eucharistie est le centre et la racine de toute la vie du prêtre, dont l’esprit sacerdotal s’efforce d’intérioriser ce qui se fait sur l’autel du sacrifice.

Dans un deuxième sens, l’expression du saint curé d’Ars signifie aussi l’Amour du prêtre lui-même pour le cœur de Jésus. Certes l’efficacité des actes de son ministère ne dépend pas du degré de sa foi et de son amour pour Jésus, mais tout prêtre sait qu’il ne peut pas puiser ailleurs que dans ce cœur, l’aliment, la force, la grâce pour sa vie spirituelle et pour le service qu’il accomplit. Le psaume d’aujourd’hui exprime bien cela : « je t’ai contemplé au sanctuaire, j’ai vu ta force et la gloire. Ton amour vaut mieux que la vie : tu seras la louange de mes lèvres ». Ces paroles s’adressent à Dieu qui pour nous a pris le visage de Jésus-Christ, son fils ; c’est lui le véritable sanctuaire, c’est lui le Grand prêtre de l’Alliance nouvelle, c’est lui l’Agneau immolé. Se couper de cette source signifierait pour les prêtres se transformer en simples fonctionnaires du culte, en administrateurs des choses religieuses. Puisse le Seigneur nous préserver de cette déchéance !

Réunis pour un dernier adieu au Père Paul Triadou, nous rendons grâce pour sa longue vie de serviteur de Dieu, serviteur du Christ, serviteur de l’Evangile ; nous rendons grâce pour sa fidélité à ses engagements pris le jour de son ordination, pour tout ce que la grâce du Seigneur a accompli par son intermédiaire dans la vie de ceux et celles qu’il a croisés sur sa route.

En ce jour où nous fêtons notre saint martyr corrézien, Pierre Dumoulin Borie (c’est le 180ème anniversaire de sa naissance au ciel), par son intercession et celle de la bienheureuse Vierge Marie, nous confions notre frère Paul à la miséricorde du Père, pour l’héritage qu’il a promis à ses enfants et qu’il leur réserve dans l’éternité. Amen.

 

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