18 février 2018 -1er dimanche de Carême – Année B — Diocèse de Tulle

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18 février 2018 -1er dimanche de Carême – Année B

Appel décisif des catéchumènes - Cathédrale de Tulle

 

Frères et sœurs, aujourd’hui, l’Evangile nous rappelle que Jésus, après avoir été baptisé dans le Jourdain, après avoir été révélé comme Fils de Dieu par l’Esprit-Saint descendu sur Lui, est conduit au désert par ce même Esprit et que là, il subit l’épreuve de la tentation dont il sort vainqueur.

Le désert, dans la Bible, est le lieu de l’épreuve et, en quelque sorte une métaphore très éloquente de la condition humaine. C’est le désert de l’Exode où, pendant 40 ans, le peuple hébreu marche vers la Terre promise, après avoir été libéré de l’esclavage de l’Egypte. Ils éprouvent la faim et la soif au point de regretter les nourritures de l’Egypte où pourtant ils étaient asservis. Ils succombent à la tentation de se créer des faux dieux, des idoles parce que le Dieu de Moïse leur semble trop lointain et comme hors de portée. Tantôt ce peuple se révolte contre Moïse et contre Dieu ; tantôt il reprend confiance, car Dieu ne l’abandonne jamais et lui manifeste par des signes sa présence aimante. Il parvient à progresser dans ce long exode vers la Terre promise, même si sa marche est lente et chaotique, même s’il tombe souvent et a bien du mal à se relever. Même le guide que Dieu lui a donné, le grand prophète Moïse, n’est pas épargné par la tentation du doute et du découragement ; cependant, il reste fidèle à la promesse de Dieu et parvient au bout du voyage où il peut contempler la Terre promise depuis le sommet du mont Nebo, même s’il ne pourra pas y entrer avec ce peuple qu’il a conduit.

Frères et sœurs, cette épreuve du désert de la tentation, nous en faisons nous-mêmes l’expérience, tout au long de notre vie, laquelle peut être, en effet, comparée à une sorte d’exode, à un chemin plus ou moins long vers la patrie céleste qui sera notre Terre promise définitive. Ceux qui parmi nous ont les cheveux blancs ou qui n’ont plus beaucoup de cheveux… ont fait, depuis de nombreuses années déjà, l’expérience de cet exode et donc des épreuves de toutes sortes qui le jalonnent, des tentations sur lesquelles on bute, des obstacles qui se dressent sur ce cheminement de foi, d’espérance et de charité. Mais il ne serait pas juste de penser que les épreuves sont épargnées aux plus jeunes. Les enfants, les adolescents, les jeunes sont soumis, eux aussi, à toutes sortes de difficultés que nos modes de vie en société rendent aujourd’hui beaucoup plus prégnantes et fréquentes que dans un passé encore récent d’une société plus stable où les grandes institutions de la famille et de l’Ecole encadraient fortement la croissance humaine et spirituelle. C’est ainsi qu’aujourd’hui de nombreux enfants, adolescents et jeunes doivent affronter l’épreuve de la séparation de leurs parents, l’épreuve de grandir sans repères solides, d’être confrontés à la violence et à la dépravation des mœurs qui s’étalent sur les écrans de leur téléphone portable ou de la télévision ; et qui plus est, celle d’être des « orphelins spirituels » parce que Dieu est le grand absent de la vie en famille, de la vie scolaire, de la vie en société. Les générations qui nous ont précédés avaient connu les affres et les douleurs de la guerre avec son cortège de souffrances et de mort ; les générations actuelles sont confrontés à d’autres épreuves et à des tentations dont on ne mesure pas encore toutes les conséquences qu’elles auront dans l’avenir.

Le récit des tentations de Jésus, au seuil de sa vie publique, met devant nos yeux le fait que la condition humaine que le Fils de Dieu a épousé en entrant dans le monde, le rend vulnérable à ce qui est le lot des enfants de ce monde. Lui qui est sans péché, lui qui est de condition divine, il ne craint pas d’être « identifié au péché » (selon l’expression qu’utilise saint Paul pour parler de l’abaissement du Fils de Dieu). C’est vrai dès son baptême dans le Jourdain où il se mêle à la foule des pécheurs venant recevoir le baptême de conversion de Jean le baptiste, alors qu’il n’a nullement besoin de conversion. C’est vrai lorsqu’il se laisse conduire au désert et se soumet à l’épreuve pour compatir à notre faiblesse. Il se laisse tenter par Satan, l’adversaire, qui depuis le début s’est opposé au dessein salvifique de Dieu au profit des hommes. Jésus n’a pas fait semblant de prendre notre condition humaine, il ne s’est pas dérobé devant les épreuves inhérentes à cette condition, il ne s’est pas prévalu de sa nature divine pour se préserver ou se protéger des difficultés, des souffrances, des épreuves que la vie réserve aux enfants des hommes. Sa mort sur la croix a été le sommet de cette condition humaine assumée librement et volontairement, pour accomplir la volonté de son Père et prendre sur lui les péchés de l’humanité afin de la sauver et de lui rendre sa dignité première, celle dans laquelle elle a été créée, à l’image de Dieu.

L’épisode des tentations au désert, d’où Jésus sort vainqueur, est comme la préfiguration de l’épreuve de la croix et de la mort dont il sortira vainqueur, en ressuscitant, premier-né d’entre les morts, entraînant l’humanité à sa suite pour la tirer hors des ténèbres du péché, du mal et de la mort éternelle.

Avec les catéchumènes, présents ici aujourd’hui pour l’appel décisif, nous entrons dans le temps du carême pour nous préparer à célébrer cette victoire du Christ, sa Pâque glorieuse, à laquelle nous sommes déjà mystérieusement associés par le baptême qui nous a fait renaître de l’eau et de l’Esprit pour une existence impérissable. Nous aussi, avec les catéchumènes qui entrent dans l’étape ultime avant l’illumination dans la nuit de Pâques, nous acceptons de nous laisser conduire au désert avec le Christ pour que, dans l’épreuve assumée de la pénitence, à travers la prière, le jeûne et l’aumône, nous resserrions le lien indestructible que notre baptême et notre confirmation a scellé avec Dieu, Père, Fils et Saint-Esprit. En acceptant d’entrer dans le combat spirituel, nous devons comprendre que pour réaliser pleinement notre vie et notre vocation baptismale, dans la liberté des enfants de Dieu, il nous faut surmonter l’épreuve que la liberté elle-même comporte, c’est-à-dire la tentation. « Ce n’est que libérée de l’esclavage du mensonge et du péché que la personne humaine, grâce à l’obéissance de la foi qui l’ouvre à la vérité, trouve le véritable sens de son existence et peut atteindre la paix, l’amour et la joie » (Benoît XVI). Face à la figure obscure et ténébreuse qui ose tenter le Seigneur, l’Evangile nous présente les figures lumineuses et mystérieuses des Anges. Les anges, dit l’Evangile, « servaient » Jésus. Ces messagers de Dieu manifestent que le diviseur, Satan, n’a pas réussi à séparer le Fils de son Père. Avec Jésus, le Règne de Dieu s’est vraiment approché des hommes. La présence des Anges, ici, comme à la crèche ou comme au tombeau vide, le matin de Pâque, témoigne de la puissance absolue de l’Amour, seul capable de vaincre le mal et de procurer la joie et la paix.

Chers catéchumènes, le Christ vous appelle pour recevoir les sacrements du salut : baptême, confirmation et eucharistie. Depuis plusieurs mois déjà et même plusieurs années, vous vous êtes engagés sur le chemin où la rencontre de Jésus-Christ, Fils de Dieu, est indissociable de la participation active à la vie de l’Eglise, Corps du Christ et Temple de l’Esprit. L’Eglise, comme une mère, vous a accueillis. Elle vous aime et elle attend que vous deveniez pleinement ses enfants.

Aujourd’hui, comme évêque, chargé du ministère des Apôtres, je vais appeler chacun et chacune d’entre vous pour l’ultime étape avant les sacrements de l’initiation. Le chemin que vous avez parcouru avec vos accompagnateurs, avec vos communautés paroissiales respectives - ce chemin je l’authentifie et le reconnais comme le chemin par lequel Dieu vous a conduit jusqu’à la foi.

Pendant 40 jours, vous allez franchir les ultimes étapes du combat spirituel. Vivez ce temps favorable avec le désir de changer en vous ce qui ne correspond pas encore à l’Evangile : « Convertissez-vous et croyez à l’Evangile », parce que le Règne de Dieu s’est approché de vous.

C’est une joie pour moi et pour l’Eglise qui est en Corrèze, pour l’Eglise universelle, de vous accueillir. Désormais, vous allez pouvoir être témoins et signes par votre participation à la vie des disciples du Christ. Que Dieu achève en vous ce qu’il a commencé. Amen.

 

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