21 janvier 2018 - 3ème dimanche du Temps ordinaire – B — Diocèse de Tulle

Aller au contenu. | Aller à la navigation

Outils personnels

21 janvier 2018 - 3ème dimanche du Temps ordinaire – B

Messe à la Cathédrale pour tous les bienfaiteurs vivants et défunts du diocèse

 

L'évangéliste saint Marc nous présente les commencements du ministère de Jésus et il en souligne deux éléments principaux. Tout d'abord, il met en valeur le contenu du message de Jésus : "les temps sont accomplis : le Règne de Dieu est tout proche. Convertissez-vous et croyez à la Bonne Nouvelle". Et ensuite, il nous indique comment Jésus met en œuvre sa mission : il appelle des disciples en leur disant : "Venez derrière moi, je ferai de vous des pêcheurs d'hommes". Ce sont ces deux axes de la mission de Jésus qui caractériseront aussi ce qui adviendra après son Ascension, lorsque l'Eglise recevra la charge de poursuivre l'œuvre du Christ pour toutes les nations. A la suite du Christ, les Apôtres partiront annoncer la Bonne Nouvelle du Salut et ils appelleront des collaborateurs pour les aider dans leur ministère. Et il en est ainsi dans l'Eglise encore aujourd'hui. Les évêques, successeurs des Apôtres, poursuivent le ministère d'annonce de l'Evangile et ils appellent des collaborateurs pour les aider dans cette tâche.

Le commencement de l'Evangile de saint Marc nous remet devant l'ampleur du projet de Dieu sur l'humanité, engagé depuis la Création du monde et qui s'est déployé à travers l'Alliance avec le peuple élu, le peuple d'Israël, constitué pour être le Peuple de Dieu au milieu des Nations.

Le livre de Jonas nous rappelle l'un des aspects de la mission du Peuple d'Israël : avertir les hommes, les réveiller pour qu'ils comprennent le danger qu'ils courent s'ils ne se convertissent pas. L'immensité de Ninive que Jonas met trois jours à parcourir symbolise l'immensité de l'humanité. Jonas est envoyé pour dire à Ninive qu'elle périra si elle ne se convertit pas. Et les habitants de cette ville se laissent toucher par le message de Jonas, ils se convertissent.

Ce message de conversion, à la suite de tous les prophètes de l'Ancien Testament, c'est aussi celui de Jésus : sa venue nous fait entrer dans l'accomplissement des temps et entraîne une urgence de la conversion. C'est ce qui fait dire aussi à Saint Paul que "le temps est limité".

Frères et sœurs, nous sommes dans ces derniers temps. Aujourd'hui sans doute plus qu'en d'autres périodes, nous avons conscience d'être dans un monde qui passe. Non pas en raison des théories scientifiques qui prédisent une fin de l'univers dans plusieurs millions d'années, mais tout simplement parce que nous prenons davantage conscience qu'aucune organisation politique, économique ou culturelle n'a les promesses de l'éternité. Une vision assez simpliste du progrès nous avait habitué à considérer beaucoup de choses comme stables et acquises définitivement. Mais voilà que la situation de crise, les bouleversements à l'échelle du monde, les dangers climatiques qui nous guettent, les déplacements de populations manifestent que cet équilibre est bien fragile et que la société à laquelle nous étions habitués est en train de se fissurer et de se dégrader.

Frères et sœurs, que pouvons-nous faire ? Allons-nous entrer dans une sorte de sauve-qui-peut généralisé, où chacun cherche une branche à laquelle s'agripper, sans trop s'occuper de ce qui se passe autour de lui ? Ou bien allons-nous prendre conscience que cette situation nous invite à réaliser que ce à quoi nous nous agrippions n'est pas la bonne planche de salut ? C'est le sens des paroles de saint Paul : "ceux qui font des achats, qu'ils vivent comme s'ils ne possédaient rien. Ceux qui tirent profit de ce monde, comme s'ils n'en profitaient pas". Il y a un appel pour nous à prendre conscience que l'avenir de l'homme ne dépend pas d'abord de l'avenir de notre société ou d'un quelconque système, mais de la promesse de Dieu de mener à son accomplissement son dessein de salut pour l'humanité.

L'appel à la conversion de Jésus nous interpelle. Si ce monde est en train de passer, que faisons-nous ? Laissons-nous les choses aller en espérant qu'elles dureront aussi longtemps que nous, ou bien cherchons-nous ce qu'il y a à faire et à nous y atteler ? Chacun est invité à un retour sur soi et à se remettre en face de la Parole de Dieu et des appels que le Seigneur nous adresse.

Serons-nous capables d'être les témoins de la Bonne Nouvelle du Salut pour les hommes et les femmes que nous côtoyons ? Déployer aujourd'hui la mission de l'Eglise, évangéliser, comme nous le demande le pape François, c'est annoncer dans ce monde qui passe qu'il y a des réalités qui ne passent pas. Tout n'est pas soumis à l'érosion, au bouleversement, à la crise. Il y a des raisons profondes de croire et d’espérer. Il existe en ce monde un point d'appui solide pour l'homme : l'amour de Dieu manifesté en Jésus-Christ ! C'est de cela dont nous avons à être témoins, par nos paroles, notre manière de vivre, notre attention à l'égard des autres.

 

Au début de sa mission publique, Jésus appelle à sa suite quelques hommes pour les préparer à être témoins de sa Parole, autrement dit à manifester par toute leur vie que la Bonne Nouvelle n'est pas simplement une parole humaine parmi tant d'autres, mais qu'elle est Parole de Dieu. Aujourd'hui, cette mission confiée aux Apôtres, nous l'assumons tous ensemble en essayant de mettre en accord, en cohérence, ce que nous vivons dans notre famille, notre travail, nos relations de voisinage, avec la seule réalité qui ne passe pas : le Christ vivant aujourd'hui dans sa Parole et dans les sacrements de l'Eglise.

Chaque dimanche, nous sommes invités à la messe pour ce rendez-vous unique et irremplaçable avec le Christ livrant sa vie par amour pour le monde. C'est cela l'Eucharistie, ainsi que les autres sacrements. Ils nous relient avec l'événement unique de notre salut. La mort et la résurrection du Christ s'actualisent pour nous permettre d'en vivre en étant des témoins. Ce service sacramentel, il constitue vraiment l'Eglise et il soutient sa mission. Il repose sur les prêtres et les diacres qui ont reçu l'imposition des mains des évêques, successeurs des Apôtres. Et il appartient à chaque génération de baptisés, depuis 2000 ans, de pourvoir à ce ministère et pas simplement de se contenter de le regarder fonctionner (en se réjouissant quand il marche bien ou en se lamentant s'il marche mal !). C'est aujourd'hui, un des plus grands défis de l'Eglise de France, de notre diocèse : comment nous soucions-nous de faire lever au milieu de nous des prêtres et des diacres au service du Peuple de Dieu ?

Ces ministres ordonnés n'accomplissent pas, à eux seuls, toute la mission de l'Eglise. Il y a, Dieu merci, beaucoup de laïcs engagés dans la vie des paroisses et du diocèse. Mais qui peut soutenir et encourager ceux et celles qui s'engagent dans la mission, si ce n'est ceux qui ont reçu le ministère apostolique ? Portons vraiment dans notre prière quotidienne le souci des vocations sacerdotales.

Aujourd’hui, au cœur de la semaine de prière pour l’unité des chrétiens, nous sommes invités à entrer dans la prière de Jésus pour ses disciples au moment d’entrer dans sa Passion : « qu’ils soient uns, comme toi et moi, père, nous sommes uns ! ». Depuis le Concile Vatican II, de grands pas ont été accomplis dans la longue marche vers l’unité des chrétiens. Il est dépassé le temps où les uns et les autres se jetaient des anathèmes… On se parle, on cherche ensemble des voies nouvelles pour vivre l’œcuménisme. Les responsables des Eglises et communautés chrétiennes ont cherché et cherchent toujours à entrer dans une estime réciproque, à mieux se connaître et à vivre une certaine communion, même si la pleine communion n’est pas encore possible. Nous comprenons mieux aussi que communion n’est pas synonyme d’uniformité ou ignorance naïve de nos différences, pas plus que volonté de tout aplanir en minimisant les différences et les obstacles. Je suis heureux, par exemple, que dans notre diocèse, nous ayons pu proposer à la communauté orthodoxe du Patriarcat roumain de lui ouvrir les portes d’une église – propriété du diocèse – pour célébrer une fois par mois la divine liturgie. C’est un bel exemple de communion fraternelle entre Eglises chrétiennes. Je crois que c’est essentiellement par des gestes de fraternité concrète que le chemin de l’œcuménisme peut se poursuivre aujourd’hui à l’échelle locale. Mais rien ne remplace la prière, laquelle nous établit dans une confiance et un abandon à la grâce divine, à la puissance de l’Esprit-Saint qui nous ouvre à une dimension surnaturelle de l’unité. Amen.

 

+ Francis BESTION

Evêque de Tulle

 

Navigation