Nos églises : des maisons sur la terre — Diocèse de Tulle

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Nos églises : des maisons sur la terre

Edito de l'Eglise en Corrèze - Juin 2019

Alors que les catholiques venaient d’entrer dans la Semaine Sainte, un événement dramatique – l’incendie de la cathédrale Notre Dame de Paris – a secoué les parisiens et la France entière, mais aussi beaucoup de gens hors de nos frontières. De nombreux parisiens se sont spontanément rassemblés aux abords de la cathédrale, tandis que des millions de téléspectateurs assistaient, eux aussi, en direct, à ce terrible événement – les uns et les autres secoués par une intense émotion et un sentiment atroce en constatant que les valeureux pompiers ne parvenaient pas à circonscrire le sinistre. Nous gardons tous en mémoire ces longues heures où l’impensable était en train de se produire sous nos yeux, sans que personne ne puisse dire jusqu’où irait le drame, sans que l’on sache si l’issue serait ou non fatale pour l’ensemble de l’édifice. Nous n’oublierons pas non plus ces images où, en alternance avec celles de la cathédrale en feu, on voyait des groupes de jeunes en train de réciter avec ferveur et dans les larmes la prière du rosaire. Il y eut ensuite, dans les heures et les jours qui suivirent, l’immense élan de solidarité et de générosité pour permettre de reconstruire la cathédrale, comme si tout un chacun, selon ses moyens, voulait apporter « sa pierre » à l’édifice.

Avec le recul, on peut dire qu’à l’imprévu du sinistre (personne n’imaginait voir cela !) a succédé l’imprévisible de la réaction de la population face à ce drame. Dans une société de plus en plus sécularisée et laïcisée, qui aurait pu penser que l’incendie de la cathédrale de Paris allait produire une telle émotion et un tel élan de générosité ? On peut certes essayer d’expliquer cela par le grand attachement des gens à notre patrimoine, surtout lorsqu’il s’agit d’un tel monument qui s’identifie à l’histoire de Paris et de la France. Mais, il y a beaucoup plus que cela ! Notre Dame est bien davantage qu’un monument historique. Nos cathédrales, nos églises de pierre sont les témoins d’un héritage spirituel qui traverse les siècles et qui dit quelque chose de fort dans un monde devenu prisonnier des objets, un monde où on utilise des choses et, presque aussitôt, on les jette, un monde où tout semble relatif parce qu’éphémère. Nos cathédrales et nos églises disent quelque chose d’un absolu, d’un intemporel, d’un éternel. Non pas parce que ce sont des bâtiments qui manifestent architecturalement la solidité et la pérennité, mais, plus essentiellement, parce qu’elles sont le symbole d’une réalité qui transcende le temps. Nos cathédrales et nos églises, dont les clochers s’élèvent au-dessus des maisons d’habitation, tournent nos regards vers le haut, vers le Ciel ; elles traduisent en quelque sorte l’aspiration secrète de l’âme humaine vers un au-delà du temps et de l’espace. En fin de compte, nos cathédrales et nos églises nous parlent de Dieu.

Tandis que la voûte de la cathédrale Notre Dame menaçait de s’effondrer, un geste qui aurait pu passer inaperçu a été relayé par tous les media : le prêtre aumônier des pompiers de Paris est entré dans la cathédrale en feu, avec un groupe de pompiers, et s’est précipité vers le Tabernacle pour en extraire le Saint-Sacrement. Ce geste en dit plus que tous les commentaires sur le caractère sacré des églises : elles abritent la présence réelle du Christ dans le Saint-Sacrement de l’Autel. Mgr Aupetit, l’archevêque de Paris, l’a rappelé, prolongeant en quelque sorte le geste de cet aumônier par des paroles d’une grande profondeur : ce magnifique lieu a été bâti pour abriter le véritable trésor, un simple bout de pain qui, pour les chrétiens, est le corps du Christ.

Puisse le drame de l’incendie de Notre Dame de Paris et l’émotion qu’il a engendré nous rappeler à tous que nos églises ne sont pas n’importe quel bâtiment, mais la Maison de Dieu où l’on célèbre le Culte divin, où l’on adore le Seigneur présent dans le Saint-Sacrement de l’Autel, où l’on écoute la Parole de Dieu et où l’on se recueille dans le silence et la paix. Les églises sont ouvertes à tous (et pour cela leur porte doit être ouverte), mais elles ne doivent pas être détournées de ce pour quoi elles ont été bâties et qui est leur raison d’être.

+ Francis Bestion,

évêque de Tulle

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