« La Paix soit avec vous ! » (Jn 20, 21) — Diocèse de Tulle

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« La Paix soit avec vous ! » (Jn 20, 21)

Edito de l'Eglise en Corrèze - Mai et Juin 2020

 

J’écris ces lignes à la veille de la « sortie » officielle du confinement sanitaire, le 11 mai. Sortie toute relative car elle ne devra pas nous dispenser de certaines précautions ou plutôt elle devra les développer davantage puisque nos relations seront plus étendues, ce dont il faut tout de même se réjouir. Lorsque vous lirez ces lignes, un autre confinement aura partiellement pris fin : je veux parler de la privation de nos assemblées liturgiques
dominicales et des autres activités pastorales, depuis la mi-mars. Je dis « partiellement » car, là encore, la reprise « normale » du culte et de tout
ce qui fait la vie de nos communautés paroissiales et de la vie diocésaine ne pourra qu’être progressif, en maintenant les précautions sanitaires indispensables pour éviter de favoriser une reprise de l’épidémie. Le virus, lui, n’est pas confiné ! Nous allons, pour un temps indéfini, apprendre
à vivre avec « ce petit ennemi invisible et sournois », sans succomber à la peur et à la paralysie, mais en faisant preuve de responsabilité, de vigilance et de sérénité.


Comme je l’écrivais dans mon message du 3 mai aux diocésains, la reprise de nos assemblées liturgiques doit s’organiser en respectant certaines règles, comme celle d’une occupation limitée de l’espace de nos églises, en fonction de leur surface. Lorsque vous lirez ces propos, ces règles seront connues plus précisément. Ce retour progressif à la normale ne permettait pas d’envisager en juin les célébrations entraînant une participation accrue de fidèles : premières communions, professions de foi, confirmations. Nous avons dû les reporter à l’automne. De même pour les sacrements de l’Initiation chrétienne. Je suis triste pour nos catéchumènes enfants et adultes qui s’étaient préparés pour recevoir ces sacrements à Pâques.
Beaucoup de mariages ont aussi été reportés.

De nombreux autres évènements, réunions, rencontres, fêtes ont subi le même sort ! C’est vrai en particulier pour la semaine « Vocations-Mission » qui devait se dérouler du 3 au 10 mai, dans le cadre de l’année de l’Appel. Je devais normalement clôturer cette année, le 10 mai, à Aubazine, avec un rassemblement diocésain. J’espère pouvoir le faire lors de la solennité de l’Assomption, le 15 août, mais sans rassemblement diocésain. Quant
à la semaine missionnaire, les Services diocésains des Vocations et de la Pastorale des jeunes n’y renoncent pas ; ils prévoient qu’elle pourra se faire au début du mois de mars 2021.

Il est encore trop tôt peut-être pour faire un « bilan » de ces mois que nous venons de vivre, en analysant ce que cela a entraîné pour chacun
d’entre nous, personnellement, en famille, socialement, économiquement et ecclésialement, pour en tirer des leçons et envisager l’avenir. Néanmoins, il peut être intéressant que chacun y réfléchisse déjà et fasse sa propre relecture, avant de pouvoir la partager avec tel ou tel groupe.

J’ai bien conscience que beaucoup de personnes ont vécu des moments difficiles et que cette période laissera des séquelles. Certains ont été éprouvés par le deuil et n’ont pas pu célébrer les obsèques de leur défunt à l’église. Les prêtres ont fait tout leur possible pour accompagner les familles et célébrer les obsèques au cimetière, mais avec un nombre limité de personnes. Des messes de requiem seront célébrées dès que ce sera possible. Le confinement a aussi été éprouvant pour la vie de famille, pour les personnes seules et isolées, pour les malades et pour nos aînés dans
les maisons de retraite, empêchés de recevoir des visites. À cela s’ajoute parfois des préoccupations professionnelles et des soucis financiers.

Le temps du confinement a suscité heureusement un formidable déploiement de générosité, de solidarité et d’attentions mutuelles ; il a vu naître de nombreuses initiatives en tout genre pour établir, garder ou renouer des liens. Je sais, par exemple, que dans des familles, on a redécouvert
la prière, parents et enfants ensemble. Les prêtres, en continuant de célébrer la messe sans le peuple, ont peut-être approfondi la place de l’eucharistie dans leur vie sacerdotale, et surtout le fait que sans le peuple de Dieu, sans le corps ecclésial, leur vocation n’a plus de sens. Beaucoup de laïcs ont fait l’expérience d’avoir faim de l’eucharistie parce qu’ils en étaient privés, et, ce faisant, ils ont aussi pris conscience qu’en temps habituel nous sommes privilégiés par rapport à beaucoup de chrétiens dans le monde et même très près de nous, comme par exemple nos aînés dans les maisons de retraite qui n’ont la messe qu’une fois par mois et jamais le dimanche ! Heureusement – même si cela ne compensait pas l’absence d’eucharistie, de nombreuses nourritures spirituelles ont été apportées, au moyen d’internet et des réseaux sociaux, par les prêtres, les responsables des services diocésains, et bien d’autres personnes qui rejoignaient ainsi les familles, les personnes seules, les
malades, dans les Communautés locales. Je suis cependant bien conscient que ceux d’entre vous qui ne sont pas connectés à internet n’ont pas pu bénéficié de toutes ces initiatives.

Je suis admiratif pour toute l’énergie déployée dans notre enseignement catholique, par le directeur diocésain, les chefs d’établissement et les enseignants (qui ont continué leur mission en redoublant d’efforts pour que les élèves continuent leur scolarité à la maison) et par les membres du personnel administratif et de service. Je veux souligner aussi l’action des associations caritatives qui n’ont pas dormi ! Elles ont fait leur possible pour venir en aide aux plus démunis, malgré des moyens limités. Et il y aura tant à faire dans les semaines et les mois à venir ! Comment ne pas
être admiratifs devant l’engagement des personnels soignants, et beaucoup plus largement celui de diverses professions, souvent peu considérées, qui ont permis à nous tous de continuer à pouvoir satisfaire nos besoins essentiels. Le temps qui s’ouvre devant nous comporte beaucoup d’incertitudes. On peut espérer que l’épidémie se résorbera, mais ses conséquences douloureuses vont perdurer. Nous devrons souvent nous rappeler la parole de Jésus à ses Apôtres affrontant la tempête sur le lac de Tibériade : « N’ayez pas peur ! ». Nos ressources spirituelles sont nombreuses et nos communautés locales devront se mobiliser pour prendre des initiatives nouvelles, particulièrement dans le domaine de la solidarité, de l’attention aux familles en difficulté, aux enfants et aux personnes âgées.

Il n’échappe à personne que notre pays, déjà terriblement endetté avant cette crise, devra faire face à des difficultés économiques et sociales
majeures. Notre Église diocésaine sera aussi affectée. Il nous faudra apprendre à vivre plus sobrement que nous ne l’avons fait jusqu’ici. C’est d’ailleurs ce que nous demandait le pape François dans sa lettre encyclique Laudato Si. Ce sera encore plus d’actualité maintenant. La lutte contre le « virus couronné » a eu le mérite – et c’est exceptionnel ! – d’opérer une sorte de révolution copernicienne. Pour un moment, l’économie s’est mise au service de l’homme au lieu de l’inverse ! Par contre-coup, cette crise a mis davantage en évidence des faiblesses et des perversions de nos sociétés où l’ ultra-libéralisme fait passer les intérêts économiques et financiers d’un petit nombre avant le souci du bien commun, et en particulier avant la considération des plus fragiles et des plus pauvres. Un fossé immense n’a cessé de se creuser, à l’échelle mondiale, entre quelques nantis et un nombre de plus en plus croissant de pauvres. Je lisais ces jours-ci des chiffres qui font froid dans le dos : à l’heure actuelle, huit personnes possèdent la même richesse que la moitié la plus pauvre de la population mondiale ! Cette crise va-t-elle conduire à des remises en question de nos manières de concevoir l’économie, de notre façon de produire et de consommer ? On voudrait l’espérer !

Pour terminer, je tiens à dire un grand merci à tous les collaborateurs de la mission de l’évêque : prêtres, diacres, laïcs exerçant des responsabilités diocésaines ou paroissiales, dans tous les domaines de la vie pastorale, mais aussi de la vie économique (je n’oublie pas l’économat diocésain qui, à côté de la gestion habituelle, doit faire face à la diminution importante de ressources qu’entraîne l’absence du culte dans les églises depuis bientôt deux mois, au moment où j’écris ces lignes !). Beaucoup travaillent dans l’ombre,
mais Dieu connaît leur labeur et leur engagement. Tenons fermes dans la prière et dans la confiance inébranlable en notre Seigneur !

Que l’Esprit de Pentecôte nous donne force et courage !
 

+ Francis Bestion
Évêque de Tulle

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