3 mai 2020 - Journée de prière pour les vocations — Diocèse de Tulle

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3 mai 2020 - Journée de prière pour les vocations

4ème dimanche de Pâques – Année A - Messe diffusée en direct de l’oratoire de la Maison diocésaine (Confinement sanitaire)

Frères et sœurs,

 

Nous connaissons tous cette image que l’Eglise antique a trouvé dans les sculptures de son temps : la figure d’un berger qui porte une brebis sur ses épaules. Cette image renvoyait sans doute à la mythologie gréco-romaine et au culte d’Hermès. Peut-être faisait-elle partie d’une sorte de rêve idyllique de la vie champêtre qui avait fasciné la société de l’époque. Quoi qu’il en soit, cette figure fut adoptée par les chrétiens et elle devint tout naturellement l’image du Christ, l’image de Celui qui s’est mis en marche pour chercher la brebis égarée dont parle les évangiles ; elle est devenue l’image de Celui qui nous suit jusque dans nos déserts et nos égarements ; l’image de Celui qui a pris sur ses épaules la brebis égarée, c’est-à-dire l’humanité, et qui la ramène au bercail. Oui, elle est devenue l’image du véritable Pasteur, du Bon Pasteur, Notre-Seigneur Jésus-Christ.

Déjà dans l’Ancien Testament, le prophète Ezéchiel avait montré Dieu comme le bon pasteur. Le psalmiste aussi, compare son Seigneur à un berger : « Le Seigneur est mon berger, il me conduit par les verts pâturages, et rien ne saurait me manquer ». Jésus, en s’identifiant lui-même à ce « bon pasteur » reprenait une image familière aux juifs pieux de son temps, et il révélait qu’en Lui s’accomplissait ces prophéties de l’Ancien Testament.

Dans l’évangile selon saint Jean, nous savons qu’une autre image est très présente : celle de l’Agneau. C’est ainsi que Jean le baptiste désigne Jésus à ses propres disciples, en s’effaçant lui-même : « Voici l’Agneau de Dieu qui enlève les péchés du monde ». L’Eglise a repris cette parole dans la liturgie de la messe, au moment de la communion. Cette image se réfère à l’Agneau immolé de la Pâque juive, qui préfigurait le Christ lui-même, immolé sur le bois de la Croix, en sacrifice pour le salut du monde.

Ainsi, les deux images, celle de l’Agneau et celle du Berger, trouvent leur jonction, leur plénitude dans le mystère de la croix. Jésus crucifié est à la fois l’Agneau et le Pasteur, le Roi et le Serviteur. Il est l’Agneau qui s’offre lui-même en sacrifice et il est le Pasteur qui prend sur lui les souffrances et tout le péché du monde. Et on comprend que le symbole de la croix ait supplanté très vite celui du berger portant sur ses épaules la brebis, au point de devenir le signe du chrétien.

En ce 4ème dimanche de Pâques, appelé dimanche du Bon Pasteur, l’Eglise prie pour les vocations et tout particulièrement pour celles qui découlent du ministère apostolique confié aux Douze et qui continuent le ministère du Christ, Bon Pasteur, Sauveur de l’humanité. Aujourd’hui, dans l’Eglise de Jésus-Christ, née de son côté ouvert sur la croix, les évêques, les prêtres et les diacres continuent cette mission du Christ Bon Pasteur, du Christ Prêtre, du Christ Serviteur des hommes. Et c’est ce mystère d’amour du Christ, qui a aimé l’Eglise et s’est livré pour elle, qui a aimé l’humanité au point d’offrir sa vie sur la croix, c’est ce mystère d’amour indépassable qui permet de saisir la véritable identité des ministres ordonnés. Ils ne sont pas des animateurs, des coordinateurs, des organisateurs, des gestionnaires de l’institution ecclésiale, même s’il leur arrive de devoir animer, organiser, coordonner et gérer… Ils sont avant tout un don que, dans son amour, le Christ Bon Pasteur fait à son Eglise et par elle à tous les hommes. Dans le sacrement de l’Ordre, ils sont consacrés par l’Esprit Saint et envoyés pour servir les Noces du Christ et de l’humanité, grâce à l’annonce de l’Evangile, la célébration des sacrements, le service de la communauté.

En ce temps de confinement sanitaire qui se prolonge, nous réalisons sans doute davantage combien est vitale pour la vie de l’Eglise (je dis bien la vie et pas la survie), pour la vie des baptisés, la célébration des sacrements et en particulier celui de l’Eucharistie, source et sommet de la vie chrétienne. Mais aussi, inséparablement, le ministère ordonné, et plus précisément le sacerdoce des évêques et des prêtres, qui, en prolongeant l’incarnation du Christ, permet l’actualisation de son mystère pascal qui est la source des sacrements.

Nous n’allons pas à l’église comme on va au cinéma ou au théâtre, comme on va dans un commerce d’alimentation ou comme on pratique une activité de loisir. On va à l’église, en communauté fraternelle, en Assemblée convoquée par le Seigneur, pour vivre ce qui est essentiel à notre foi et donc à notre salut. Manger, boire, dormir, travailler et se détendre sont des réalités certes indispensables pour l’existence humaine, mais qui ne suffisent pas à combler le cœur de l’homme et qui ne permettent donc pas de le définir pleinement comme Homme. Ceux qui vivent comme si Dieu n’existait pas peuvent finir par ignorer qui est l’Homme, et à penser, par exemple, que des robots humanoïdes pourraient se substituer à une personne humaine pour prendre soin des personnes âgées, des personnes seules, des personnes malades, dans ces endroits qu’on a nommé de l’horrible acronyme d’E.H.P.A.D. « Le crépuscule des dieux » - pour reprendre un titre bien connu – devient alors progressivement le crépuscule des hommes !

Aujourd’hui, l’Eglise prie aussi pour les vocations religieuses. Dans l’Eglise, les consacrés témoignent, par le choix radical de conformer leur vie aux conseils évangéliques de pauvreté, de chasteté et d’obéissance, de la réalité mystérieuse du Royaume de Dieu. Ils sont, dans l’Eglise, un des signes prophétiques majeur que l’homme ne vit pas seulement de pain, que la personne humaine ne se réduit pas à ses composantes biologiques, physiologiques, organiques, et que la personne humaine ne trouve sa vraie liberté que dans une obéissance filiale à Dieu son Père.

Les consacrés – par leur vie empreinte de sobriété, par leur vie faite de prière et de contemplation, par leur vie de service, par leur vie communautaire – sont le signe que le Royaume de Dieu est déjà présent et à l’œuvre dans le monde et qu’il vaut la peine de vivre pour Dieu, de l’aimer plus que tout, de tout notre cœur et de toutes nos forces, parce qu’il est notre lumière, notre route, notre avenir, notre joie et notre Espérance, bref qu’il est notre Vie et notre salut.

 

Frères et sœurs, en ce temps pascal, contraints d’être privés un temps encore des célébrations liturgiques communes dans nos églises, demeurons tout de même dans la joie et l’espérance du jour de Pâques, en attendant, comme la Vierge Marie et les Apôtres, au Cénacle, le don de l’Esprit-Saint. Ils étaient confinés par peur des juifs ; nous le sommes par peur du virus. Mais l’Esprit Saint est plus fort que toutes les peurs et nous aurons bien besoin qu’il nous préserve de succomber au virus de la peur et à celui de la suspicion, qui seront (et qui le sont déjà) tout autant et même beaucoup plus pernicieux et destructeurs que le coronavirus. Les prophètes ou les prêtres de l’ordre sanitaire nouveau ont inventé une expression affreuse : « la distanciation sociale », alors qu’il suffisait de parler de distance « physique ». Puisse l’Esprit d’Amour, l’esprit de charité divine nous inspirer plus que jamais la proximité sociale ou mieux encore la proximité fraternelle ! Amen.

+ Francis BESTION

 

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