26 février 2020 - Mercredi des Cendres — Diocèse de Tulle

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26 février 2020 - Mercredi des Cendres

Cathédrale de Tulle

Frères et soeurs,

Le Carême commence avec des cendres et il nous achemine vers les flammes du feu de la vigile pascale. C’est dire que ce chemin n’est pas celui de l’errance ; nous cherchons à atteindre un but, celui de la célébration du mystère pascal du Christ, sa mort et sa résurrection, car ce mystère est vraiment le coeur de notre foi.

En ce jour, c’est comme si retentissait encore le son du cor, qui accompagnait l’oracle du Seigneur transmis par le prophète Joël. Ce n’est pas la harpe mélodieuse ou la douce musique de la flûte qui viendrait caresser nos oreilles ; c’est le son strident du cor qui annonce un jeûne sacré. Pourquoi un jeûne ? Le message du prophète l’indique par une brève exhortation : « revenez à moi de tout votre coeur ! ». Il s’agit donc de revenir à Dieu. Cela signifie qu’entre-temps nous sommes allés ailleurs. Nous devons retrouver le vrai chemin, celui de la vraie vie : la vie en Dieu, la vie avec Dieu, la vie pour Dieu. Dans le quotidien de nos existences, vers où allons-nous le plus souvent, quels sont nos chemins ? Peut-être celui de la recherche de la santé, un bien très précieux en effet, mais dont nous savons pourtant qu’il est fragile et qu’il finira par passer... Peut-être celui de la recherche du bien-être, mais dont nous sommes conscients qu’il est éphémère et qu’il ne procure pas nécessairement la joie... Peut-être celui de la recherche du bonheur, mais qui s’avère une sorte de quête sans fin... Mais voilà qu’aujourd’hui, au son du cor, l’oracle du Seigneur nous indique le but du chemin : « revenez à moi ! ». Pas à ceci ou à cela, mais à moi. Revenir à Dieu. C’est en effet le Seigneur qui est le but de notre voyage dans le monde, de notre pèlerinage sur la terre.

Pour retrouver le chemin, un signe nous est donné : le signe des cendres. Elles vont être imposées sur nos têtes. Les cendres, c’est de la poussière. Une réalité qui n’a pratiquement pas de consistance. C’est le résidu d’une combustion, c’est-à-dire un presque rien, quelque chose qui s’envole au vent et qui disparaît, comme les réalités terrestres qui finissent par s’évanouir. Comme les biens que nous possédons et qui sont provisoires, comme le pouvoir qui passe, comme les succès qui un jour ou l’autre pâlissent. Les cendres peuvent évoquer cette culture de l’apparence, dominante dans notre société, qui pousse tant de personnes à vivre pour les choses qui passent, pour l’éphémère. C’est la grande tromperie de notre époque. Comme le dit le pape François, « le temps du Carême est là pour nous libérer de l’illusion de vivre en poursuivant la poussière... ». Car, malgré les apparences, nous ne sommes pas faits pour un monde qui passe ; nous sommes faits pour Dieu, pour l’éternité divine ; nous ne sommes pas faits pour la cendre mais pour le feu qui ne s’éteint pas, celui de la charité divine, de l’amour divin. Aujourd’hui, le signe des cendres est comme une question qui nous est posée au commencement de la marche du Carême : vais-je vivre pour le feu ou pour la cendre ?

Frères et soeurs, pour cet itinéraire de retour à Dieu qu’est le Carême – revenez à moi –, l’Evangile nous offre trois ressources où nous pourrons puiser sans faux semblants, sans hypocrisie, sans nous donner en spectacle : la prière, l’aumône et le jeûne. La prière, c’est le coeur à coeur avec Dieu, ce qui me tient uni au Seigneur indéfectiblement. L’aumône, c’est la charité qui me relie à mes frères, particulièrement les plus nécessiteux. Le jeûne, par la maîtrise de mes appétits de toutes sortes, c’est ce qui permet à mon corps, mon âme et mon esprit de se libérer des convoitises et de me relier à la profondeur de mon être. Prière, charité, jeûne : trois réalités, trois attitudes, trois modes de vie qui me tournent vers Dieu, vers les autres et vers l’intérieur de mon être.

Pour revenir à Dieu, notre coeur a besoin de s’attacher à quelque chose de ferme, de solide, de sûr. Cela ne peut pas être des choses terrestres. A vrai dire, cela ne peut pas être quelque chose. Les choses peuvent être utiles pour notre vie quotidienne, mais pas au point de nous attacher à elles. Elles nous servent, mais nous ne devons pas les servir, sinon c’est que nous en devenons esclaves. Il s’agit plutôt de s’attacher à ce qui ne passe pas, afin de devenir vraiment libres. Le Carême est ce temps privilégié de l’année où nous sommes remis devant le mystère de la liberté de Dieu choisissant de vivre avec nous et de mourir pour nous en son Fils Jésus, un temps où nous sommes invités à découvrir inlassablement la liberté avec laquelle il s’est donné jusqu’au bout du don, un temps pour apprendre ce qu’est la véritable liberté et pour nous ouvrir au don de cette liberté.

Frères et sœurs, où sera notre boussole pour ce temps de Carême, où allons-nous fixer nos regards ? Sur Jésus en croix ! La croix du Seigneur est le signe du plus grand dépouillement, par amour. Les yeux fixés sur Jésus qui s’offre à son Père pour nous sauver, nous comprendrons jusqu’à quel point a pu aller la miséricorde de Dieu pour nous ; et chacun peut dire : pour moi. En regardant Jésus, nous apprendrons à nous libérer de beaucoup de choses qui nous encombrent et nous empêchent d’avancer sur le chemin de la conversion, en particulier de l’emprise du consumérisme et de l’égoïsme. En regardant Jésus dont le cœur brûle d’amour pour nous, nous nous laisserons libérer d’une vie qui se perd dans les cendres du monde pour trouver une vie nouvelle qui brûle de charité. Est-ce facile ? Non, c’est même très exigeant, comme le soulignait la prière d’ouverture de cette messe, en parlant d’entraînement au combat spirituel. Mais le but de la marche en vaut la peine ! Le Carême nous montre ce but. Je vous le disais : il commence avec les cendres et il nous mène jusqu’au feu de Pâques, de la nuit de Pâques où nous célèbrerons la résurrection du Christ dont la chair n’est pas devenue poussière au tombeau, mais a resurgi toute glorieuse.

Nous qui sommes poussière, si nous revenons à Dieu, avec nos faiblesses et le poids de nos péchés, si nous nous laissons réconcilier par Lui, comme nous y invitait saint Paul dans la 2ème lecture, si nous prenons le chemin de l’amour, alors notre vie pourra s’embraser et entrer dans la Vie du Ressuscité qui n’a pas de fin. Et, cela nous procurera la joie. Amen.

 

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