Samedi 4 février 2017 - Récollection des diacres de la Guadeloupe — Diocèse de Tulle

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Samedi 4 février 2017 - Récollection des diacres de la Guadeloupe

4 février 2017 - Basse-Terre

Comme les Apôtres, après avoir accompli leur mission, vous êtes venus, vous aussi, vous reposer un peu à l’écart, près du Maître. Et vous avez de la chance, car je ne crois pas que les foules vous aient suivis jusqu’ici et que vous deviez changer vos plans… Deo gratias !

Ce passage de l’Evangile nous révèle en profondeur qui est Jésus. Il nous parle de « sa compassion ». Dommage que la traduction en français affaiblisse un peu l’expression du grec original. Le mot de compassion est certes très parlant, mais le verbe grec évoque plus ; il parle des profondeurs de l’être, des entrailles, du cœur. Il ne s’agit pas d’un vague sentiment qui traverserait l’esprit de Jésus, une sorte d’émotion passagère comme tout homme peut en éprouver en certaines circonstances, mais d’un mouvement intérieur de l’âme, du cœur, de tout l’être qui exprime la miséricorde ; c’est un des trois verbes grecs des évangiles pour exprimer la miséricorde divine.

Ce qui fait naître cette miséricorde dans le cœur de Jésus c’est la vue des foules qui sont comme des brebis sans pasteurs, c’est-à-dire des brebis abandonnées, des brebis déboussolées, des brebis contraintes à errer, à divaguer, sans personne pour les mener paître, pour les soigner, pour veiller sur elles afin de leur éviter le danger des bêtes sauvages. Cette situation est telle que Jésus change ses plans ; il n’est plus question de se reposer, de se tenir à l’écart, il faut veiller sur cette foule, il faut l’enseigner, la guider, la soigner.

Cette compassion, cette miséricorde de Jésus nous révèle non seulement qui est Jésus, mais qui nous sommes, nous qu’il a choisis pour participer au ministère apostolique. Nous comprenons que c’est la vue des foules sans bergers qui suscite la compassion, mais d’un même mouvement, qui suscite aussi le ministère de Jésus et le ministère des Apôtres. L’origine du ministère apostolique, c’est la miséricorde du Christ ! Autrement dit, nous savons d’où nous venons, nous savons d’où nous sommes nés, et par conséquent aussi pour quoi nous sommes faits. Nous ne sommes pas nés d’un calcul, d’une stratégie, d’une idéologie, d’un programme de solidarité sociale ; nous sommes nés d’une compassion, d’une miséricorde, nous sommes nés d’un cœur humano-divin qui ne sait battre qu’au rythme de l’amour miséricordieux. Voilà, chers amis notre origine comme évêque, comme prêtre, comme diacre. Ne la cherchons pas dans des raisonnements, dans des théories, dans des stratégies ; elle nous est révélée dans le comportement de Jésus miséricordieux, icône vivante de la miséricorde du Père. Cette origine de notre ministère apostolique en indique, du même coup, sa raison d’être, sa mission et son style.

La raison d’être du ministère des successeurs des Apôtres, les évêques, et de leurs collaborateurs que sont les prêtres et les diacres, c’est de donner à la miséricorde de Jésus les moyens de s’exercer aujourd’hui pour les hommes et les femmes de ce monde qui sont, comme les foules de l’évangile, des brebis sans berger. Nous sommes des instruments au service de la miséricorde pour qu’à chaque âge du monde, les hommes soient enseignés, soignés et guidés. Nous sommes des serviteurs, certes bien pauvres et faibles, mais des serviteurs de la miséricorde divine. Voilà notre raison d’être.

De là découle notre mission. Pour vous diacres, elle se traduit concrètement dans la triple diaconie de la liturgie, de la parole et de la charité. Vous n’êtes pas des pasteurs du troupeau, mais vous êtes bel et bien au service du troupeau pour la diaconie de la miséricorde qui se traduit dans la sanctification, l’annonce de l’Evangile et une forme particulière de la charité.

Enfin, notre origine nous indique aussi un « style » pour accomplir notre mission. C’est un mot qu’affectionne le pape et qui revient souvent dans sa bouche et sous sa plume. Il y a un style pour être ministre du Christ miséricordieux. Ce n’est pas le style des PDG, ce n’est pas non plus le style des DRH, pas plus que celui des commerciaux ou des stratèges du marketing ou de la communication. C’est un style qui ne s’enseigne pas forcément dans les temps de formation initiale au ministère ; qu’on ne trouve pas nécessairement dans les livres. C’est un style qui s’expérimente dans le service lui-même et dans ces temps de ressourcements comme celui que Jésus proposait à ses Apôtres. Pour ne pas devenir des robots du service, des diacres-machines, pour ne jamais risquer de nous éloigner de la source, de l’origine de notre ministère, il faut rester ‘branchés’, ‘raccordés’ à cette source, à cette origine qui est le cœur de Jésus, son cœur miséricordieux. Celui qui écoute battre le cœur de Jésus, dans un cœur à cœur quotidien avec lui, dans l’écoute de sa parole, dans la prière de la Liturgie des heures, dans l’eucharistie, celui-là se laisse façonner pour déployer un style diaconal de son ministère qui sera celui de la compassion divine.

Voilà chers amis ; demandons la grâce de ne jamais oublier d’où nous sommes nés : de la pitié de Jésus pour les foules sans berger. Puisse le rappel de cette origine, accompagner, soutenir, renouveler, vivifier notre ministère et le rendre toujours plus fécond. Amen.

 

+ Francis BESTION

Evêque de Tulle

 

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