30 août 2017 - Journée de Rentrée des directeurs de l’Enseignement catholique du Limousin — Diocèse de Tulle

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30 août 2017 - Journée de Rentrée des directeurs de l’Enseignement catholique du Limousin

Maison diocésaine de Limoges

Chers amis,

les invectives de Jésus, très sévères, contre les pharisiens peuvent mettre mal à l’aise les oreilles des lecteurs actuels des évangiles plutôt portés à ne retenir dans la Sainte Ecriture que ce qui ne risque pas de trop déranger leur vie… Ces invectives sont loin de la langue de bois ou de buis dont l’utilisation est souvent reprochée aux hommes politiques, mais aussi aux autorités religieuses – dont les évêques – par des gens qui voudraient que ces autorités dénoncent avec plus de force et de vigueur certains travers de la société libérale, tout en ne manquant pas aussi de reprocher à ces mêmes autorités de prendre position quand ça ne va pas dans le sens de leurs propres idées ou opinions… Le ministère épiscopal de la communion n’est pas toujours aisé !

Je reviens à Jésus et à ses invectives contre les pharisiens dans l’évangile de saint Matthieu dont nous faisons la lecture continue dans le lectionnaire de semaine. Les jours précédents, nous avons lu les cinq premières invectives. Aujourd’hui nous avons entendu la sixième et la septième. La sixième fait allusion aux tombeaux qu’on blanchissait à la chaux pour les rendre plus visibles, même la nuit, afin qu’on ne risque pas de se rendre impur par le contact de la mort. L’image est forte ; elle veut signifier que sous la belle apparence extérieure de l’homme qui se prétend juste peut se cacher la laideur de l’homme intérieur. La 7ème invective concerne aussi les tombeaux. Les juifs érigeaient des tombeaux à la mémoire des prophètes. Ils se rappelaient que leurs ancêtres avaient mis à mal les envoyés de Dieu, parce que ces derniers dénonçaient vigoureusement leurs infidélités à Dieu. Le fait de leur construire des tombeaux valait comme une sorte de signe de repentir ou de « repentance ». Jésus sait bien que les pharisiens auxquels il s’adresse n’ont pas tué des prophètes. Mais il sait aussi qu’ils s’affichent comme parfaits et irréprochables aux yeux de leurs contemporains, sans doute comme le faisaient leurs ancêtres criminels. Et il en conclut qu’en cela, ils ne valent pas plus chers.

Nous aurions tort de mettre tous les pharisiens dans le même sac, d’autant que si Jésus n’hésite pas à leur faire des reproches, c’est le groupe religieux qu’il fréquente aussi le plus. Mais, en s’attaquant à eux, il dénonce une attitude générale chez ces hommes souvent admirés parce qu’ils ont une belle apparence de pureté et de vertu, alors que leur être profond, leur âme est souillée par bien des vices.

Ces paroles dures de Jésus, nous les recevons, non pas à la manière des historiens de la Bible qui s’intéresseraient au comportement d’un des grands groupes religieux du temps de Jésus, celui des pharisiens, à côté d’autres groupes, comme les Saducéens, les Zélotes ou les Esséniens. Nous les recevons comme des disciples de Jésus, désireux, comme le dit saint Paul (1ère lecture), d’ « accueillir la Parole de Dieu pour ce qu’elle est réellement, non pas une parole d’hommes, mais la Parole de Dieu qui est à l’œuvre en nous, les croyants ». En quoi les propos de Jésus nous concernent-ils ? Vous conviendrez que ce n’est pas bien difficile à reconnaître. Jésus nous invite à purifier notre cœur, notre intérieur, notre âme, à nous laisser purifier par la grâce, en nous revêtant d’humilité pour nous convertir. Ce qui est en cause, c’est l’écart qu’il y a entre ce que nous paraissons aux yeux des autres et ce que nous sommes réellement ; l’écart entre nos paroles et nos actes ; l’écart entre ce que nous professons dans la foi et ce que nous vivons pratiquement. Il n’est pas trop difficile de reconnaître que dans la vie des chrétiens, il existe, au mieux un hiatus, au pire un fossé, quand ce n’est pas un abîme, entre l’extérieur et l’intérieur de l’être. C’est même sans doute le plus grand drame de nos existences de baptisés.

L’appel à la conversion qui est un des leitmotivs des évangiles vise précisément à réduire cet écart, ce hiatus, ce fossé entre le dire et le faire, le paraître et l’être. Le pape François revient souvent sur l’exigence de cohérence de la vie chrétienne. Cette exigence vise en premier lieu la vérité de nos vies, mais aussi la pertinence du témoignage qui est attendu de nous par nos frères et sœurs chrétiens et par ceux qui ne le sont pas, mais qui nous regardent vivre.

Ce qui est vrai de tout baptisé, l’est d’une manière plus spéciale encore pour ceux qui ont la belle et redoutable mission d’être des éducateurs. Je ne dis pas des « enseignants », mais des éducateurs, car « éduquer », c’est bien la mission de l’Enseignement catholique : éducation intégrale, c’est-à-dire qui prend en compte toutes les dimensions de la personne humaine. Et nous pensons bien sûr que l’Evangile reste la référence indépassable pour cette éducation intégrale. Ouvrir aux jeunes qui nous sont confiés le trésor de l’Evangile, c’est leur faire le plus beau cadeau qui soit, c’est leur donner ce qu’il y a de meilleur.

Belle et redoutable mission, disais-je, parce qu’elle nous implique personnellement. Si je suis enseignant, le fait d’enseigner les mathématiques ne m’implique pas personnellement ; en revanche, éduquer le jeune qui m’est confié m’implique personnellement, car cela touche forcément à la cohérence de ma propre vie. Et nous savons bien que les jeunes ne manquent pas de faire remarquer à leurs parents leurs incohérences.

Cela ne signifie pas qu’il faudrait attendre d’être parfait pour devenir un bon éducateur. Nous risquerions de ne jamais commencer à le devenir. Nous serions dans la situation de l’homme de la morale kantienne, dont on a dit qu’il avait les mains propres, mais parce qu’il n’avait pas de mains ! En revanche, cela signifie que comme chrétien, disciple de Jésus-Christ, et de plus comme éducateur, j’ai la vive conscience que je ne suis pas à la hauteur et que je ne peux pas m’en satisfaire en me complaisant dans le paraître. C’est ce qui faisait dire à saint Augustin : « l’Evangile m’effraie ». Non pas dans le sens où l’Evangile devrait nous faire peur, car alors il ne serait pas la Bonne nouvelle du Salut ; mais, dans le sens où il nous invite sans cesse, si nous nous en laissons pénétrer, à convertir notre cœur pour réduire le fossé entre les paroles et les actes, entre le paraître et l’être ; bref, à gagner toujours plus en cohérence dans ma vie de disciple-missionnaire de Jésus. C’est pour cela que les saints et saintes sont toujours très humbles parce qu’ils ont une vive conscience du moindre péché qui entrave cette cohérence de vie. Et nous sommes tous appelés à la sainteté ! C’est-à-dire à devenir ce que nous sommes en puissance de part notre baptême. Le baptême a fait de nous des saints et notre vie dans cet état de grâce consiste à devenir des mendiants de l’amour divin pour n’en manquer jamais et permettre à cet amour de convertir notre cœur pour qu’il soit le plus semblable possible au cœur de Jésus. C’est la grâce que nous pouvons nous souhaiter les uns aux autres en ce début d’année scolaire. Amen.

 

 

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