8 OCTOBRE 2017 - 27ème DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE — Diocèse de Tulle

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8 OCTOBRE 2017 - 27ème DIMANCHE DU TEMPS ORDINAIRE

Beaulieu - Départ de Sœur Josiane et Sœur Cécile

"Dans ton amour inépuisable, Seigneur, tu combles ceux qui t'implorent, bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs".

Ces paroles de la prière d'ouverture de la messe de ce 27ème dimanche du temps ordinaire résument l'action de grâce de l'Eglise. Oui, Seigneur, tu nous combles, bien au-delà de nos mérites et de nos désirs !

Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus n'hésitait pas à dire que "tout est grâce", et, en disant cela, elle reconnaissait que nous ne méritons rien, que les dons de Dieu sont absolument gratuits, que notre foi, notre espérance et notre charité ne reposent pas sur nos propres forces, mais qu'elles sont des dons de Dieu que nous avons reçus au baptême et que les autres sacrements nous permettent d'entretenir, de fortifier et de développer.

Notre capacité de désirer est presque infinie ; elle a été mise en l'Homme par le Créateur pour que nous puissions aspirer aux dons les meilleurs, pour que nous ayons soif de l'absolu, pour que nous soyons des chercheurs de Dieu. Saint Augustin a résumé cela en une belle expression : "Tu nous as fait pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu'il ne demeure en toi". Dans nos sociétés occidentales où nous disposons de tout le nécessaire et même du superflu, où nous sommes devenus très tributaires et parfois même esclaves des biens de consommation (d'ailleurs l'économie n'est basée que sur la consommation ; d'où la crise grave que nous traversons), le risque qui nous menace tous est de ne plus avoir besoin de Dieu et que, par conséquent, nos désirs aussi se limitent à des choses terrestres, à des biens matériels, à des aspects superficiels de la condition humaine. Bref, ce qui menace beaucoup de nos contemporains et peut-être même les chrétiens que nous sommes, c'est de vivre comme si Dieu n'existait pas ! La crise que nous traversons en occident et même désormais dans l'ensemble des pays du monde n'est pas seulement une crise économique, sociale ou politique, c'est une crise beaucoup plus grave : c'est une crise du sens de l'existence. Elle est peut-être providentielle, si elle nous permet de nous poser certaines questions : Pour quoi vivons-nous ? Que cherchons-nous ? A quoi passons-nous notre temps ? Qu'espérons-nous ?

L'homme moderne a eu tendance à tout miser sur les succès de la science et de la technique, sur ce qu'on a appelé "le progrès" ; il a pensé qu'il n'y avait aucune limite à son développement, à son bien-être, à l'accroissement de sa richesse. Aujourd'hui, voilà que ce même homme moderne est confronté à une véritable crise de civilisation. Il s'aperçoit que les rêves nourris par l'idéologie du progrès ne produisent pas le résultat escompté : la planète se trouve en danger à cause du développement anarchique et de l'épuisement des ressources naturelles, de la pollution engendrant des dérèglements climatiques. La médecine a fait d'immenses progrès, mais certaines maladies graves ne sont pas vaincues et de nouvelles épidémies menacent la planète. La pauvreté s'accentue dans de nombreux pays, entrainant des migrations importantes que personne ne peut maîtriser. On pourrait continuer la liste… Dans cette ambiance morose, la tentation est grande de chercher des coupables, de proposer des solutions radicales et souvent simplistes, d'attiser la haine entre les catégories sociales, les nations et même les religions.

Et pourtant, dans cette situation de crise, d'incertitudes sur l'avenir, nous ne pouvons pas, nous baptisés, nous résigner à la morosité, à la lamentation et à l'inquiétude. C'est ce que saint Paul écrit aux chrétiens de la ville de Philippe, alors que lui-même est en prison : "Ne soyez inquiets de rien, mais, en toute circonstance, dans l'action de grâce priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes". Celui qui a mis sa foi et son espérance dans le Seigneur ne peut pas vivre dans l'inquiétude du lendemain comme ceux qui ne croient en rien ou ceux qui n'ont pas d'espérance. Parce qu'il a confiance en Dieu, il peut toujours trouver des motifs d'action de grâce, et il peut toujours supplier le Seigneur de lui venir en aide.

Aujourd’hui où nous disons au revoir à Sœur Josiane et Sœur Cécile, c’est une belle occasion de nous remémorer que la vie religieuse, la vie consacrée est dans l’Eglise une réalité qui rappelle à tous les baptisés et aussi au monde que nous « n’avons pas ici-bas de cité permanente » (Hb 13, 14), parce que « notre cité se trouve dans les cieux » (Ph 3, 20) et qu’en fin de compte, la seule chose vraiment nécessaire est de chercher « le Royaume de Dieu et sa justice » (Mt 6, 33), en implorant sans cesse la venue du Seigneur.

Par leurs charismes divers, les personnes consacrées deviennent signe de l'Esprit en vue d'un avenir nouveau, éclairé par la foi et par l'espérance chrétienne. Les religieux et les religieuses, les moines et les moniales, les laïcs consacrés témoignent, en professant les Conseils évangéliques de pauvreté, de chasteté et d’obéissance que le sens de notre vie dépasse les contingences matérielles de la vie ici-bas auxquelles nous sommes soumis et dans lesquelles nous pouvons facilement nous engluer. La vie consacrée témoigne d’une attitude que l’Evangile souligne fortement – celle de la vigilance en vue du Royaume. Ceux et celles qui veillent pour attendre l'accomplissement des promesses du Christ sont en mesure de communiquer l'espérance à leurs frères et sœurs, tentés de se décourager ou de devenir pessimistes face à l'avenir. L’espérance se fonde sur la promesse de Dieu que contient la Parole révélée : l'histoire des hommes avance vers « le ciel nouveau et la terre nouvelle » (Ap 21, 1), dans lesquels le Seigneur « essuiera toute larme de leurs yeux : de mort, il n'y en aura plus ; de pleur, de cri et de peine, il n'y en aura plus, car l'ancien monde s'en est allé » (Ap 21, 4).

L'Orient chrétien souligne cet aspect, lorsqu'il désigne les moines et les moniales comme « des anges de Dieu sur la terre » qui annoncent le renouveau du monde dans le Christ. Le message de la vie contemplative et plus largement de la vie consacrée, redit sans cesse que la primauté de Dieu apporte à l'existence humaine une plénitude de sens et de joie, car l'homme est fait pour Dieu et il est sans repos tant qu'il ne repose en Lui (Saint Augustin).

Frères et sœurs, avec vous je tiens à exprimer ma profonde reconnaissance à Sœur Josiane et sœur Cécile pour leur présence dans l’Eglise diocésaine, dans les communautés locales de Meyssac et Beaulieu et, pour Sœur Josiane, dans la Communauté éducative de Jeanne-d’Arc, à Argentat, pendant de nombreuses années, au service de la jeunesse. Je parle d’abord de « présence », car la vie consacrée, par sa seule présence dans une communauté chrétienne est déjà un signe prophétique. Mais bien sûr, je les remercie pour les missions qu’elles ont accomplies parmi nous.

Frères et sœurs, nous sommes tous et chacun, selon notre état de vie et nos charismes, des ouvriers dans la Vigne du Seigneur. Je me rappelle les mots du Pape Benoît XVI lors de sa première allocution, à la Logia de la Basilique Saint-Pierre, après son élection : « Chers frères et soeurs, après le grand pape Jean-Paul II, les cardinaux m’ont élu moi, un humble et simple ouvrier de la Vigne du Seigneur. Je suis réconforté de savoir que le Seigneur sait oeuvrer et agit aussi avec des instruments insuffisants. Et avant tout, je m’en remets à vos prières ».

Tel est le mystère de l’Eglise que nous devons toujours méditer : l’Eglise n’est pas une entreprise, elle n’est pas une association, elle n’est pas avant tout une institution, elle est la vigne élue, la vigne chérie, à propos de laquelle prophétisait Isaïe. Elle est inséparable du Christ car elle sort du Christ, elle en est l’Epouse mystique. Dans cette Vigne, nous sommes appelés, de par notre Baptême, première des vocations, et selon notre vocation particulière, à être des disciples-missionnaires du Christ. C’est le cœur des Orientations pastorales diocésaines que nous devons garder comme cap, comme boussole, comme instrument pastoral, dans les communautés locales et sur le plan diocésain.

C'est le Christ qui nous met en communion pour la même mission, celle d'être des porteurs de la joie de l'Evangile pour nos frères et sœurs qui ne connaissent pas encore Jésus ou qui tout en le connaissant délaissent la communauté. Dans la communion de l'Eglise, soyons vraiment des témoins de la joie de l'Evangile. Amen.

 

+ Francis Bestion

Evêque de Tulle

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