5 octobre 2014 - 27ème dimanche Temps Ordinaire – Année A — Diocèse de Tulle

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5 octobre 2014 - 27ème dimanche Temps Ordinaire – Année A

Visite pastorale à la Paroisse du Sacré-Cœur Les Rosiers – BRIVE - Confirmation de 14 jeunes. Bénédiction d'une cloche

"Dans ton amour inépuisable, Seigneur, tu combles ceux qui t'implorent, bien au-delà de leurs mérites et de leurs désirs".

Ces paroles de la prière d'ouverture de la messe de ce 27ème dimanche du temps ordinaire résument l'action de grâce de l'Eglise ; et nous n'avons pas du mal à les faire nôtre en ce jour où quatorze jeunes vont recevoir le sacrement de la confirmation et quatre d'entre eux vont recevoir pour la première fois le Corps du Christ. Oui, Seigneur, tu nous combles, bien au-delà de nos mérites et de nos désirs !

Sainte Thérèse de l'Enfant-Jésus n'hésitait pas à dire que "tout est grâce", et, en disant cela, elle reconnaissait que nous ne méritons rien, que les dons de Dieu sont absolument gratuits, que notre foi, notre espérance et notre charité ne reposent pas sur nos propres forces, mais qu'elles sont des dons de Dieu que nous avons reçus au baptême et que les autres sacrements nous permettent d'entretenir, de fortifier et de développer. Vous, chers jeunes, qui allaient recevoir le sacrement de confirmation, vous pouvez vous dire : "`Seigneur, je ne mérite pas le don que tu me fais de ton Esprit-Saint, et ce don, il va bien au-delà de tout ce que je peux désirer de meilleur !".

Notre capacité de désirer est presque infinie ; elle a été mise en l'Homme par le Créateur pour que nous puissions aspirer aux dons les meilleurs, pour que nous ayons soif de l'absolu, pour que nous soyons des chercheurs de Dieu. Saint Augustin a résumé cela en une belle expression : "Tu nous as fait pour toi, Seigneur, et notre cœur est sans repos tant qu'il ne demeure en toi". Dans nos sociétés occidentales où nous disposons de tout le nécessaire et même du superflu, où nous sommes devenus esclaves des biens de consommation (d'ailleurs l'économie n'est basée que sur la consommation ; d'où la crise grave que nous traversons), le risque qui nous menace tous c'est de ne plus avoir besoin de Dieu et que, par conséquent, nos désirs aussi se limitent à des choses terrestres, à des biens matériels, à des aspects superficiels de la condition humaine. Bref, ce qui menace beaucoup de nos contemporains et peut-être même les chrétiens que nous sommes, c'est de vivre comme si Dieu n'existait pas ! La crise que nous traversons en occident et même désormais dans l'ensemble des pays du monde n'est pas seulement une crise économique, sociale ou politique, c'est une crise beaucoup plus grave : c'est une crise du sens de l'existence. Elle est peut-être providentielle, si elle nous permet de nous poser certaines questions : Pour quoi vivons-nous ? Que cherchons-nous ? A quoi passons-nous notre temps ? Qu'espérons-nous ?

L'homme moderne a eu tendance à tout miser sur les succès de la science et de la technique, sur ce qu'on a appelé "le progrès" ; il a pensé qu'il n'y avait aucune limite à son développement, à son bien-être, à l'accroissement de sa richesse. Aujourd'hui, voilà que ce même homme moderne est confronté à une véritable crise de civilisation. Il s'aperçoit que les rêves nourris par l'idéologie du progrès, par la rationalité scientifique et technique ne produisent pas le résultat escompté : la planète se trouve en danger à cause du développement anarchique et de l'épuisement des ressources naturelles, de la pollution engendrant des dérèglements climatiques ; la médecine a fait d'immenses progrès, mais certaines maladies graves ne sont pas vaincues et de nouvelles épidémies menacent la planète ; la pauvreté s'accentue dans de nombreux pays, entrainant des migrations importantes que personne ne peut maîtriser. On pourrait continuer la liste… Dans cette ambiance morose, la tentation est grande de chercher des coupables, de proposer des solutions radicales et souvent simplistes, d'attiser la haine entre les catégories sociales, les nations et même les religions.

Et pourtant, dans cette situation de crise, d'incertitudes sur l'avenir, nous ne pouvons pas, nous baptisés, nous résigner à la morosité, à la lamentation et à l'inquiétude. C'est ce que saint Paul écrit aux chrétiens de la ville de Philippe, alors que lui-même est en prison : "Ne soyez inquiets de rien, mais, en toute circonstance, dans l'action de grâce priez et suppliez pour faire connaître à Dieu vos demandes". Celui qui a mis sa foi et son espérance dans le Seigneur ne peut pas vivre dans l'inquiétude du lendemain comme ceux qui ne croient en rien ou ceux qui n'ont pas d'espérance. Parce qu'il a confiance en Dieu, il peut toujours trouvé des motifs d'action de grâce, et il peut toujours supplier le Seigneur de lui venir en aide. Il peut toujours faire sienne la prière du centurion des évangiles : "Seigneur, je crois, mais viens en aide à mon manque de foi !"

Chers jeunes, en demandant à recevoir le sacrement de confirmation vous donnez à la communauté chrétienne le témoignage de la foi et de l'espérance. En demandant le sacrement de la confirmation, vous nous rappelez la foi de l'Eglise : "je crois en l'Esprit-Saint qui est Seigneur et qui donne la vie" ; c'est cette foi que vous allez proclamer dans quelques instants lorsque je vous interrogerai. Et toute l'assemblée la proclamera aussi avec vous. Vous n'allez pas recevoir le sacrement de la confirmation parce que vous savez tout sur Dieu, tout sur Jésus ; vous n'allez pas le recevoir parce que vous êtes au top de la foi, parce que votre charité est sans défaut. Les sacrements sont des cadeaux du Seigneur pour nous permettre d'avancer, de grandir dans la foi, dans l'espérance et dans la charité ; ce sont des dons de Dieu pour nous fortifier.

Quand un ami, une amie nous fait un cadeau, alors les liens d'amitié deviennent encore plus forts, plus étroits. Aujourd'hui, le Seigneur Jésus vous fait un grand cadeau : le don de son Esprit pour que votre amitié envers lui soit plus grande et plus forte et que vous deveniez ses témoins affermis. Il vous aime et il attend que vous l'aimiez. Dans les lettres que vous m'avez écrites (et je vous en remercie), vous me parlez de vos passions : le sport, la danse, les animaux, etc. Mais vous ne me parlez pas beaucoup de Jésus et de votre amitié avec Jésus. Sans doute que vous n'avez pas osé m'en parler… C'est bien d'aimer le sport, la danse, son chat ou son chien, la musique et bien d'autres choses, mais je puis vous dire que ce n'est pas cela qui vous rendra heureux, et les adultes qui sont là et qui ont l'expérience de la vie pourraient vous dire la même chose. Le bonheur et la joie profonde ne viennent pas des choses, des objets, des animaux. Non. Le secret de la joie durable, c'est l'amour du Seigneur et l'amour de nos frères. Nous avons été créés pour aimer : aimer Dieu et aimer notre prochain. Tout le reste est sûrement intéressant, mais ne nous rend pas heureux. La preuve de ce que je dis, c'est qu'il y a des gens dont on dit habituellement qu'ils ont tout pour être heureux (ils ont réussi dans la vie, ils ont des diplômes, ils ont de l'argent, ils ont un métier, etc.) et pourtant ils sont tristes. Pourquoi ? Parce qu'ils sont toujours insatisfaits ; ils voudraient avoir toujours plus et être toujours plus. Mais celui ou celle qui a commencé à faire l'expérience que Dieu l'aime, que Dieu l'aime infiniment, celui ou celle qui a commencé à faire l'expérience d'aimer à son tour, d'aimer Dieu gratuitement et d'aimer les autres gratuitement, celui-là, celle-là découvre la joie. Les amis de Jésus ne sont pas tristes. Ils n'ont pas peur de l'avenir, ils ne sont pas inquiets, parce qu'ils savent qu'ils sont sauvés du péché et de la mort. Ca ne veut pas dire qu'ils ne connaîtront pas des épreuves, ça ne veut pas dire qu'ils n'ont pas à travailler et à peiner pour gagner leur vie, ça ne veut pas dire qu'ils ne connaîtront pas l'échec ; mais ça veut dire qu'ils ont la certitude qu'ils ne sont pas seuls, qu'ils ne sont pas abandonnés, qu'ils ne sont pas perdus. Ils se rappellent sans cesse les paroles de Jésus : "venez à moi, vous tous qui peinez sous le poids du fardeau, et moi je vous procurerai le repos" (Mt 11, 28).

L'eucharistie que nous célébrons nous introduit au plus haut point dans le mystère pascal du Christ, c'est-à-dire qu'elle actualise pour nous, aujourd'hui, la passion du Christ, sa mort et sa résurrection. Nous pouvons entrer dans l'offrande du Christ à son Père et recueillir les fruits de la Rédemption. C'est pour cela que la messe du dimanche est vraiment la source et le sommet de notre vie chrétienne. Ensemble, nous formons le Corps du Christ, c'est-à-dire l'Eglise, avec nos différences, nos charismes, nos complémentarités, mais la même foi. C'est le Christ qui nous met en communion pour la même mission, celle d'être des porteurs de la joie de l'Evangile pour nos frères et sœurs qui ne connaissent pas encore Jésus ou qui tout en le connaissant délaissent la communauté. Dans la communion de l'Eglise, soyons vraiment des témoins de la joie de l'Evangile. Amen.

 

+ Francis Bestion

Evêque de Tulle