Jeudi saint 2 avril 2015 - Messe en mémoire de la Cène du Seigneur — Diocèse de Tulle

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Jeudi saint 2 avril 2015 - Messe en mémoire de la Cène du Seigneur

Paroisse du Sacré-Cœur des Rosiers, Brive

"Jésus ayant aimé les siens qui étaient dans le monde les a aimés jusqu'à l'extrême".

Frères et sœurs, pour nous faire comprendre ce que veut dire cet amour de Jésus jusqu'à l'extrême, l'évangéliste saint Jean a choisi de nous rapporter un signe qui ne s'invente pas, celui du lavement des pieds. Et ce signe nous aide et nous invite à entrer en profondeur dans le sens de la célébration eucharistique et dans ses conséquences pour notre vie chrétienne.

Quel est donc cet amour jusqu'à l'extrême, manifesté dans le signe du lavement des pieds et dans le signe de l'Eucharistie ? C'est la réalité du don de sa vie que fait Jésus, à la veille d'être livré au mains des pécheurs et de se livrer lui-même librement ; c'est, tout ensemble : son arrestation, son procès, sa condamnation, sa crucifixion et sa mort sur la croix. Nous en ferons mémoire demain dans l'Office de la Passion. La mort du Christ sur la croix est la réalité de l'amour de Dieu allant jusqu'au bout et dont la Cène et le lavement des pieds du jeudi saint sont déjà le signe.

Une fois que l'on a dit cela et qu'on l'a compris, il n'est pourtant pas illégitime pour notre raison humaine et pour notre foi de nous demander comment cette réalité de l'amour absolu de Dieu, signifiée dans l'offrande du Christ, peut atteindre, non seulement les contemporains de Jésus, ceux qui ont été témoins de la Passion, mais aussi nous-mêmes, aujourd'hui, et l'humanité tout entière. Autrement dit, comment est-il possible que cette réalité de l'amour de Dieu soit aujourd'hui signifiée à travers des signes, des paroles, des gestes qui en perpétuent le souvenir et surtout qui la rendent effective, actuelle et bien réelle pour nous ?

Les évangiles et saint Paul donnent la réponse à cette question à travers deux gestes qui sont pour ainsi dire les garants de cet amour du Christ.

Il y a d'abord le sacrement de l'eucharistie. Saint Paul nous rapporte ce qui s'est passé la veille de la Passion. Jésus a béni, rompu et partagé le pain ; il a béni et donné à ses Apôtres la coupe de vin, annonçant et rendant réel que ce pain partagé c'était vraiment son Corps livré pour l'humanité, que cette coupe de vin, c'était vraiment son Sang versé pour la multitude en rémission des péchés. Si bien que chaque fois que nous célébrons l'eucharistie, comme il nous a dit de le faire ce soir-là, chaque fois, le pain que le prêtre consacre en prononçant les paroles de Jésus, devient le Corps du Christ. Il est le signe visible et efficace du sacrifice unique par lequel Jésus a donné sa vie par amour pour le Père et pour ses frères. La coupe de vin que le prêtre consacre devient le Sang du Christ, signe visible et efficace de l'amour de Dieu vécu jusqu'au bout par Jésus, en signe de l'Alliance éternelle entre Dieu et les hommes.

Il y a un second signe que nous rapporte saint Jean et qui exprime aussi, d'une autre manière, non sacramentelle, l'amour extrême du Christ pour les hommes et en particulier pour ses disciples. Ce signe, Jésus le présente comme un exemple qu'il nous invite à reproduire : "c'est un exemple que je vous ai donné, afin que vous fassiez vous aussi comme j'ai fait pour vous". Et c'est effectivement ce que la liturgie de ce jeudi saint nous fait reproduire. Jésus, lui, le Seigneur et le Maître, a pris le tablier de service et, pour signifier la nature de sa mission et le don de sa vie, s'est mis à genou aux pieds de ses disciples, accomplissant le geste de l'esclave envers son maître pour leur laver les pieds. En bien, la liturgie de ce jour, invite celui qui préside l'Assemblée eucharistique – l'évêque ou le prêtre – à faire ce même geste, pour indiquer le sens de son ministère, ce ministère qu'il a reçu pour le service, au nom du Christ. Consacré par l'ordination sacerdotale ou épiscopale, il est devenu pasteur de la communauté. Celui qui préside, qui a la première place, à qui l'on témoigne affection et respect, c'est celui-là même qui se met à genou devant ceux qu'il est chargé de conduire, se faisant ainsi leur serviteur. Et ce signe liturgique n'a réellement de sens que parce qu'il exprime une réalité vécue : les activités du ministre ordonné sont bien au service de la communauté, à travers la charge et les missions pour lesquelles il consacre sa vie au service de l'Eglise ; il n'en reçoit aucun titre de gloire, si ce n'est celui du serviteur qui se met à genou aux pieds de ceux qui sont ses frères et ses sœurs. Les ministres ordonnés, dans la tradition de l'Eglise catholique, ne se contentent pas de remplir des fonctions nécessaires. Ils sont les signes efficaces de l'amour du Christ pour les membres de son corps ecclésial et pour toute l'humanité.

Frères et sœurs, c'est le même Esprit qui, dans un même mouvement, fait de nous, prêtres et évêques, ceux qui consacrent le pain et le vin et ceux qui sont les serviteurs du Corps tout entier. Et c'est aussi au même amour du Christ que communient ceux qui reçoivent de leur main le Corps et le Sang du Christ, lesquels constituent la réalité du Sacrifice du Christ, rendu présent, actualisé pour nous aujourd'hui, c'est-à-dire la réalité de son amour et de sa vie offerts pour nous et la multitude. Nous communions au même amour qui s'exprime dans le pain et le vin consacrés, partagés, et aussi dans le service du Christ aux pieds des disciples, rendu présent et actuel dans le service sacerdotal et diaconal.

Et nous devons comprendre que ceux que quelques-uns, appelés et choisis par Dieu – les ministres ordonnés – accomplissent au service de leurs frères dans la communauté, tous doivent aussi le vivre dans le Corps ecclésial en s'aimant les uns les autres comme lui-même, le Christ, nous a aimés. Autrement dit, nous devons tous nous faire les serviteurs les uns des autres. On n'est pas disciples du Christ, membres de son Corps, pour revendiquer que l'Eglise fasse ce qui nous plaît, mais pour s'ouvrir à l'action de l'Esprit-Saint afin qu'il transforme nos vies pour faire de nous des serviteurs.

Frères et sœurs, prions pour que le Seigneur ouvre nos cœurs et que nous puissions accueillir le don qu'il nous fait de son amour et de sa vie, pour pouvoir communier à ce don et participer ainsi à son service, aujourd'hui, pour l'Eglise et pour le monde. Amen.

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